Grand Carême
Liturgie des Présanctifiés
Saint Léon, pape de Rome (461) ; saints Maxime, Claude, Prépédigne, Alexandre et Cutias, martyrs à Rome (295) ; saint Agapet, évêque de Sinade en Phrygie, confesseur (IVème s.) ; saint Flavien, patriarche de Constantinople, confesseur (449) ; saint Côme de Yakhroma (1492) ; saint Vladimir (Terentiev), confesseur (1933).
SAINT LÉON, PAPE DE ROME

Du temps où l’Église d’Occident était en communion avec l’Église indivisible, le pape de Rome, en tant qu’évêque de la capitale de l’Empire et patriarche d’Occident, jouissait d’une certaine prééminence dans la communion ecclésiastique, et il était considéré par tous les chrétiens comme le gardien par excellence de la tradition apostolique, en servant d’arbitre en matière de dogme. Occupant le siège de Rome à une des époques les plus critiques de l’histoire, époque qui vit l’effondrement de la partie occidentale de l’Empire romain et où l’Église se trouvait menacée de toutes parts de déchirement par les hérétiques, saint Léon a su proclamer la saine doctrine de la Vérité et a mis tout son soin pour préserver l’unité de la sainte Église, c’est pourquoi il est justement vénéré, en Orient comme en Occident, sous le titre de saint Léon le Grand.
Né à Rome dans une noble famille originaire de Toscane, il entra de bonne heure dans le clergé et ne tarda pas à recevoir la dignité d’archidiacre de l’Église de Rome, charge qui l’amenait à prendre une part considérable dans toutes les affaires ecclésiastiques et les controverses doctrinales de son temps. C’est au cours d’une de ses missions en Gaule qu’il apprit la mort du pape Célestin Ier et qu’à son insu, il avait été unanimement élu par le peuple pour lui succéder. Lors de son intronisation, en septembre 440, et chaque année, à l’anniversaire de celle-ci, il témoignait dans ses sermons de sa crainte devant la charge qui lui incombait et de sa confiance en la seule grâce divine pour mener le gouvernail de l’Église.
Lourde était en effet la tâche qui se présentait à lui. L’Empire, menacé par les barbares, était de plus miné par la perversion des mœurs, et les Églises, déchirées par les hérésies, laissaient le peuple de Dieu dans l’ignorance et le relâchement. En mêlant admirablement la rigueur à la compassion, saint Léon commença par régénérer le clergé et rétablir le bon ordre dans les Églises d’Afrique et de Sicile, qui venaient d’être victimes des invasions vandales. Dans l’Illyricum, alors dépendant de Rome, il consolida l’autorité du métropolite de Thessalonique, et il restaura aussi le respect de la hiérarchie ecclésiastique dans l’Église des Gaules. Avec une fine perspicacité, il dévoilait les machinations des hérétiques manichéens et donnait aux évêques et aux prêtres l’exemple du bon pasteur par sa vie irréprochable, par le soin qu’il mettait dans l’organisation du culte divin et par ses sermons d’une sobre éloquence. À l’occasion des différentes fêtes de l’année liturgique, il édifiait le peuple, en lui interprétant les mystères de la Foi, et l’exhortait à mener une vie conforme aux principes évangéliques .
Outre cette œuvre pastorale, c’est surtout dans le domaine dogmatique que saint Léon a mérité les honneurs de l’Église. Lorsqu’à la suite des intrigues de l’hérétique Eutychès, soutenu par le puissant ministre Chrysaphe, le faux concile, justement qualifié par saint Léon lui-même de Brigandage d’Éphèse, prononça la condamnation de saint Flavien [16 fév.], le pape, sitôt informé, s’empressa de réprouver de toute son autorité les événements et convoqua un concile des évêques d’Occident, en vue d’annuler les Actes de cette assemblée inique et de rétablir la vraie foi concernant la Personne du Christ. Avant même le pseudo-concile d’Éphèse, saint Léon avait adressé une lettre admirable au patriarche saint Flavien, dans laquelle, après avoir exposé en toute clarté la foi de l’Église en la divinité du Christ, il écrivait :
« Les propriétés des deux natures (divine et humaine) restent donc entières, mais se réunissent en une seule Personne, la majesté s’est liée à l’humilité, la puissance à la faiblesse, l’éternité à la mortalité, afin de pouvoir payer la dette que nous avions contractée, la nature inaccessible à la souffrance s’est unie à celle qui peut souffrir, et comme il le fallait pour nous sauver, Jésus-Christ fait homme, seul Médiateur entre Dieu et les hommes, a pu mourir de sa nature humaine en demeurant immortel dans sa nature divine … Il a pris la forme de la servitude sans la souillure du péché, rehaussant l’humanité sans amoindrir la divinité ; car cet abaissement, par lequel l’invisible s’est rendu visible et le Créateur, Seigneur de toutes choses, a voulu devenir l’un des mortels, a été une condescendance de sa miséricorde et non une diminution de sa puissance …
Le Fils de Dieu est donc venu en ce monde, descendant du séjour céleste, mais sans abandonner la gloire de son Père, et Il est né dans un nouvel ordre de choses et par une naissance nouvelle … La même Personne est donc à la fois vrai Dieu et vrai homme, et cette unité est très véritable, car on y trouve en même temps l’humanité de l’homme et la grandeur de Dieu … L’Église catholique vit et se perpétue par cette croyance que dans le Christ Jésus, l’humanité n’est pas sans véritable divinité, ni la divinité sans véritable humanité » .
On raconte que saint Léon écrivit cette lettre, inspiré par le Saint-Esprit, après de nombreux jours passés dans le jeûne, la veille et la prière, et qu’après l’avoir écrite, il la posa sur le tombeau de saint Pierre, en conjurant le Coryphée des Apôtres de la corriger de toute erreur qui aurait pu s’y glisser par suite de la faiblesse humaine. Au bout de quarante jours, le saint Apôtre lui apparut pendant qu’il priait et lui dit : « J’ai lu et j’ai corrigé. » De fait, en ouvrant la lettre, saint Léon la trouva corrigée de la main de saint Pierre. Cette lettre, remise à ses légats pour être lue au Concile d’Éphèse, fut écartée par les hérétiques. Mais, lorsque le pieux empereur Marcien et sainte Pulchérie convoquèrent le Concile Œcuménique de Chalcédoine (451), on la lut solennellement devant tous les Pères, qui l’accueillirent en s’écriant d’une seule voix : « C’est la foi des Apôtres, c’est la foi des Pères. Pierre a parlé par la bouche de Léon ! »
Pendant que ces grands événements avaient lieu en Orient, l’Occident souffrait pour sa part des ravages causés par Attila et ses hordes de Huns. Après avoir répandu la mort et la destruction en Allemagne et en Gaule, et avoir traversé les Alpes, ils saccagèrent la région de Milan et vinrent menacer Rome. L’empereur, le Sénat et le peuple désemparés supplièrent alors le pape d’entreprendre une démarche de paix auprès du tyran barbare qui faisait trembler le monde. Revêtu de ses ornements pontificaux, à la tête d’un imposant cortège de prêtres et de diacres chantant des cantiques, le saint hiérarque se présenta devant Attila et, à la surprise de tous, celui qu’on appelait le fléau de Dieu montra un respect craintif et accepta de s’en retourner, moyennant un tribut annuel. Quand ses soldats lui demandèrent pourquoi il avait montré cette clémence inaccoutumée, Attila répondit qu’il avait vu aux côtés du pape l’Apôtre Pierre, tenant une épée à la main et le menaçant d’un air terrible. Rome fut ainsi miraculeusement épargnée, mais pour peu de temps, car le peuple ingrat oublia aussitôt le bienfait de Dieu et retourna, l’empereur en tête, à ses désordres habituels. Aussi, le Seigneur, ne tempérant plus sa colère contre la fière cité, permit aux Vandales de Genséric, débarqués d’Afrique, de s’emparer de la capitale et de la piller, en 455. Le pape intervint de nouveau auprès des assaillants et put obtenir d’eux l’engagement de ne pas massacrer la population, ni d’incendier les édifices. Ils se contentèrent de prendre un immense butin et d’emmener en déportation une grande partie de la population, nobles et gens du peuple. Sitôt le fléau apaisé, saint Léon s’employa à consoler les rescapés, à restaurer les églises dévastées et à rétablir, autant que possible, la vie chrétienne dans la ville qui, autrefois si glorieuse, gisait désormais déchue. Il parvint ainsi à envoyer des prêtres et d’importantes aumônes pour secourir les déportés en Afrique. Le reste de sa vie fut consacré à son œuvre pastorale, en corrigeant les abus qui s’étaient glissés dans la discipline ecclésiastique, et à soutenir de son autorité la foi de Chalcédoine, menacée par la réaction des nombreux monophysites, en particulier dans l’Église d’Alexandrie. Il remit finalement son âme à Dieu, en 461, au terme d’un pontificat de vingt et un ans.
(Tiré du Synaxaire du hiéromoine Macaire de Simonos Petras)
TROPAIRES ET KONDAKIA DU JOUR
Tropaire de saint Léon, ton 8
Guide de l’orthodoxie, maître de piété et de sainteté, * luminaire de l’univers, ornement des pontifes inspiré de Dieu, * saint Léon, tu nous as tous illuminés par tes sages enseignements, * toi qui fus comme une lyre vibrant au souffle de l’Esprit. * Intercède auprès du Christ notre Dieu pour qu’il sauve nos âmes.
Kondakion de saint Léon, ton 3
Toi qui siégeas sur un trône sacré * et fermas les bouches léonines de l’hérésie, * par ta doctrine divinement inspirée * tu as fait briller la connaissance de la sainte Trinité; * c’est pourquoi tu as été glorifié * comme un saint oracle de la grâce de Dieu.
Lectures de l’Ancien Testament
Isaïe III, 1-14
Voilà que le Dominateur, Dieu des armées, va enlever de la Judée et de Jérusalem le puissant et la puissante227, la force du pain et la force de l’eau ; le grand, le fort et l’homme de guerre, le juge, le sage et l’ancien ; le chef de cinquante hommes et le conseiller vénérable, l’habile architecte et l’auditeur intelligent. Et Je ferai des jeunes gens leurs princes et des railleurs les gouverneront. Et le peuple en viendra aux mains, homme contre homme, ami contre ami; l’enfant frappera sur le vieillard, l’infâme sur l’honnête homme. L’homme prendra son frère ou son proche parent dans la famille de son père, et il lui dira : Tu as un manteau, sois notre prince, et que ma nourriture soit dans ta main. Et ce jour-là l’autre répondra : Je ne serai pas ton prince, car il n’y a en ma maison ni pain ni manteau ; je ne serai pas le prince de ce peuple. Car Jérusalem est ruinée et Juda est tombé ; et leurs langues sont avec l’iniquité, et ils n’obéissent point au Seigneur. C’est pourquoi leur gloire est maintenant abaissée, et la confusion de leur visage porte témoignage contre eux; et, comme Sodome, ils ont montré et proclamé leur péché. Malheur à leurs âmes ! Car ils ont pris une funeste résolution contre eux-mêmes, disant : enchaînons le juste, parce qu’il nous est insupportable. Aussi goûteront- ils les fruits de leurs œuvres. Malheur à l’impie ! Il lui arrivera mal à cause des œuvres de ses mains. Mon peuple, tes exacteurs rapinent et des usuriers te maîtrisent; mon peuple ceux qui te déclarent heureux t’égarent, et ils bouleversent le sentier où tu marches. Mais maintenant le Seigneur va siéger pour juger et il entrera en jugement avec son peuple. Le Seigneur en personne entrera en jugement avec les anciens et les princes du peuple. Vous donc, pourquoi avez-vous mis le feu à ma vigne? Pourquoi la dépouille du pauvre est-elle en vos maisons?
Genèse II, 20 – III, 20
Adam donna des noms à tous les bestiaux, et à tous les oiseaux du ciel, et à toutes les bêtes des champs. Mais il ne se trouvait pas pour Adam d’aide semblable à lui. Alors Dieu fit tomber Adam en extase et l’endormit ; puis Il prit une de ses côtes, qu’il remplaça par de la chair. Et de cette côte qu’Il avait prise à Adam, Il forma une femme et Il la conduisit a Adam. Et Adam dit : Ceci maintenant est un os de mes os et une chair de ma chair. Celle-ci sera appelée femme, parce qu’elle a été prise de la chair même de l’homme. À cause de cela, l’homme quittera son père et sa mère, il restera fortement attaché à sa femme, et ils seront deux en une seule chair. Ils étaient nus tous deux : Adam et sa femme ; et ils n’en avaient point honte. Or, le serpent était le plus rusé de tous les animaux qu’avait créés sur la terre le Seigneur Dieu. Et le serpent dit à la femme : Pourquoi Dieu a-t-il dit : Ne mangez pas de tous les arbres du paradis ? La femme dit au serpent : Nous pouvons manger des fruits des arbres du paradis. Quant au fruit de l’arbre qui est au milieu du paradis, Dieu a dit : Vous n’en mangerez pas, vous n’y toucherez pas, afin que vous ne mouriez point. Le serpent dit à la femme : Vous ne mourrez point de mort. Car le Seigneur Dieu sait, au contraire, que le jour où vous en mangerez, vos yeux s’ouvriront, et vous serez comme des dieux, connaissant le bien et le mal. La femme vit que l’arbre était bon comme aliment, qu’il était plaisant à voir au regard, et magnifique à contempler. Et, ayant pris de son fruit, elle en mangea ; de plus, elle en donna à son mari, et ils mangèrent. Aussitôt leurs yeux à tous les deux s’ouvrirent ; ils reconnurent qu’ils étaient nus ; ils attachèrent les unes aux autres des feuilles de figuier, et ils s’en firent des ceintures. Et ils entendirent la voix du Seigneur Dieu, se promenant l’après- midi dans le paradis, et Adam et sa femme se cachèrent de la face du Seigneur Dieu, dans l’ombrage des arbres du paradis. Le Seigneur Dieu appela Adam, et il lui dit : Adam, où es-tu? Celui-ci répondit : J’ai entendu Ta voix, comme Tu te promenais dans le paradis, et j’ai eu peur parce que je suis nu, et je me suis caché. Dieu lui dit : Qui t’a fait savoir que tu es nu, si tu n’as mangé de l’arbre, de celui-là seul dont je t’avais défendu de manger ? Adam reprit : la femme que Tu m’avais donnée pour être avec moi m’a donné elle-même du fruit de l’arbre, et j’en ai mangé. Le Seigneur Dieu dit alors à la femme : Pourquoi as-tu fait cela ? Et la femme dit : Le serpent m’a trompée, et j’ai mangé. Le Seigneur Dieu dit au serpent : parce que tu as fait cela, maudit sois-tu parmi tous les bestiaux et les bêtes fauves de la terre ; tu marcheras sur la poitrine et le ventre, et tu mangeras de la terre tous les jours de ta vie. J’établirai une haine entre toi et la femme, et entre ta race et sa race. Il surveillera ta tête, et tu guetteras son talon. Puis le Seigneur dit à la femme : Je multiplierai et multiplierai tes gémissements et tes douleurs ; tu enfanteras dans les douleurs, tu attendras le commandement de ton époux, et il te maîtrisera. Quant à Adam, Dieu lui dit : Parce que tu as écouté la voix de ta femme, et que tu as mangé de l’arbre, du seul dont je t’avais défendu de manger, maudite sera ta terre en tes travaux. Tu t’en nourriras dans les douleurs tous les jours de ta vie. Elle produira pour toi des épines et de l’ivraie, et tu mangeras l’herbe des champs. C’est à la sueur de ton front que tu mangeras ton pain, jusqu’à ce que tu retournes dans la terre d’où tu as été tiré, parce que : Tu es terre, et tu t’en iras dans la terre. Adam donna à la femme le nom d’Ève, parce qu’elle-même est mère de tous les vivants.
Proverbes III, 19-34
Dieu a fondé la terre par la Sagesse ; Il a affermi le ciel par la Prudence. Grâce à sa prévoyance, les abîmes ont été rompus, et les nuages ont répandu la rosée. Mon fils, que ces choses ne s’éloignent pas de toi ; garde mes conseils et ma science, afin que ton âme vive, et que la grâce demeure autour de ton cou, la santé sera en ta chair, et le bien-être en tes os ; afin que tu marches, en toutes tes voies, plein d’assurance et de paix, et que ton pied ne trébuche pas. Si tu reposes, tu seras sans crainte ; si tu sommeilles, tu dormiras doucement229. Tu ne redouteras ni les alarmes soudaines, ni les attaques des impies. Car le Seigneur sera sur toutes tes voies, et Il affermira ton pied de peur que tu ne chancelles. Ne t’abstiens pas de faire du bien à l’indigent, sous prétexte que ta main ne peut le secourir. Ne dis pas, quand tu pourras bien faire : Va et reviens, demain je te donnerai; car tu ne sais ce qu’amènera le jour suivant. Ne pense pas à mal contre ton ami qui vit près de toi, et se fie à toi. Ne prends pas en haine un homme sans motif, de peur qu’il ne vienne à te nuire. Ne t’attire pas les outrages d’hommes méchants; ne porte point envie à leurs voies. Car tout pervers est impur devant le Seigneur, et il ne siégera point dans l’assemblée des justes. La malédiction de Dieu est sur la maison des impies; mais les chaumières des justes sont bénies. Le Seigneur résiste aux orgueilleux; mais Il donne Sa grâce aux humbles.