1er juin (ancien calendrier) / 14 juin (nouveau)

Carême des saints Apôtres

Saint Justin le Philosophe et ses compagnons : Chariton, Charité, Evelpiste, Hiérax, Péon, Valérien et Justin, martyrs à Rome (166) ; saint Reverien, évêque d’Autun (273) ; saint Caprais, abbé du monastère de Lérins (430) ; saint Clair, évêque martyr (IVème s.) ; saint Agapet, médecin, anargyre, des Grottes de Kiev (XIème s.); saint Denis, abbé de Glouchistsa (1437); saint Ronan, ermite en Bretagne (VIème s.) ; saint Justin de Tchélié (1979) ; nouveaux martyrs de Russie : hiéromartyr Basile (Preobrajensky), prêtre, Vera (Samsonov), martyre (1940).

SAINT JUSTIN DE TCHÉLIÉ

St Justin naquit à Vranié, dans le sud de la Serbie, le 25 mars 1894, au sein d’une famille qui avait donné sept générations de prêtres, et reçut le nom de Blagoïe (« Annonciation »). Nourri de la piété de ses parents, il fut témoin de la guérison miraculeuse de sa mère, et lorsqu’elle décéda, il eut le sentiment « physique de l’immortalité », en contemplant son visage rayonnant de paix. Durant toute sa vie, il allait être un témoin de cette foi inébranlable en la victoire sur la mort que le Christ Sauveur est venu nous apporter. Enfant, il se rendait souvent au monastère de Ptchinié et nourrissait une grande dévotion envers saint Prochore. À cette piété pour les saints, il joignait la lecture assidue de l’Écriture Sainte, et depuis l’âge de quatorze ans jusqu’à la fin de sa vie, il se donna pour règle de lire chaque jour trois chapitres du Nouveau Testament. Avide d’approfondir les mystères de la Révélation, il entra au Séminaire Saint-Sava à Belgrade (de 1905 à 1914). Au début de la Première Guerre Mondiale, il entra dans l’unité des infirmiers, et après avoir été guéri du typhus, il suivit l’armée serbe dans sa retraite au Monténégro, puis en Albanie jusqu’à Skadar. La foi du jeune Blagoïe ayant été encore raffermie par cette terrible épreuve, au cours de laquelle plus de cent mille Serbes périrent de faim, de froid et d’épuisement, il réussit à convaincre le métropolite Dimitri de le tonsurer moine (1916), sous le nom de saint Justin le Philosophe, qui avait témoigné de son amour du Christ, tant par la philosophie que par le martyre. Depuis Corfou, il fut envoyé à Saint-Pétersbourg, pour y compléter ses études théologiques. Marqué par la piété du peuple russe, il nourrissait une fervente dévotion pour saint Serge, saint Séraphim de Sarov et saint Jean de Cronstadt, et plus tard lorsqu’il évoquait les saints néomartyrs russes, particulièrement le saint patriarche Tikhon, les larmes lui venaient aux yeux. Contraint de quitter la Russie à cause des troubles qui précédèrent la Révolution bolchevique, il alla poursuivre ses études à Oxford (1916-1919), où il prépara une thèse de doctorat sur Dostoïevski. Exposant la position critique de l’écrivain russe sur l’humanisme et l’anthropocentrisme occidentaux, le Père Justin se vit imposer par ses professeurs des modifications qu’il refusa, et il quitta l’Angleterre sans prendre de diplôme. De retour en Serbie, il devint enseignant au Séminaire de Sremski Karlovtsi et, de là, partit pour Athènes, où il soutint une thèse intitulée : le Problème de la personne et de la connaissance selon saint Macaire d’Égypte. Ayant saisi, au cours de ses études, que toute la civilisation occidentale, qui prétend exalter l’homme indépendamment de Dieu, aboutit à une impasse effrayante, il se fit dès lors le défenseur sans compromis du « divino-humanisme » orthodoxe, fondé sur la Personne du Christ, vrai Dieu et vrai homme, le Premier et le Dernier, vers qui toute chose aspire jusqu’à atteindre sa plénitude et qui reste la « Valeur suprême et le critère ultime de l’Orthodoxie ». De retour en Serbie, il se lia d’amitié avec les évêques russes réfugiés en Serbie, et il rendait souvent visite au métropolite Antoine (Krapovitsky) de Kiev, auquel il se confessait, et à l’archevêque Anastase de Kichiniev, dont il admirait la prière angélique. Dès l’époque de ses études, il menait une vie spirituelle intense et l’on a retrouvé après son trépas le journal intime, qu’il rédigeait à l’époque de ses études, et dans lequel il notait qu’il faisait de cinq cents à mille métanies chaque jour, et mille à deux mille prières de Jésus. Pendant le Carême, il augmentait cette règle de prière, pour atteindre 3200 métanies et 1800 prières de Jésus le Grand Vendredi. « Malheur à toute pensée qui ne se transforme pas en prière », disait-il. En 1922, il fut ordonné prêtre, malgré lui, par le métropolite Dimitri et, pendant plusieurs années, il exerça la fonction de professeur d’Exégèse au Séminaire de Sremski Karlovtsi. Peu après avoir publié une étude sur la Gnoséologie de saint Isaac le Syrien (1927), il fut envoyé au Séminaire de Prizren au Kosovo, et, au bout d’un an, fut nommé à Bitol en Serbie du Sud, où il enseigna en compagnie de St Jean Maximovitch.  En 1930, il reçut la mission d’organiser la vie ecclésiale des fidèles de Russie subcarpathique (alors Tchécoslovaquie), qui étaient revenus à l’Orthodoxie après avoir été unis à Rome sous la domination austro-hongroise. Comme on lui proposait d’être élevé à l’épiscopat, il répondit : « Je me suis regardé longuement dans le miroir de l’Évangile, et je suis parvenu à la décision irrévocable que je ne puis en aucun cas recevoir le rang d’évêque, car je n’en ai pas les qualités fondamentales ». En 1932, il publia le premier volume de sa Dogmatique, qu’il intitula de manière significative : Philosophie orthodoxe de la Vérité, ouvrage qui lui valut d’être nommé professeur de Dogmatique à la Faculté de théologie de Belgrade, en 1935. Comme enseignant, il considérait que « celui qui n’enseigne pas la vie éternelle est un pseudo-éducateur ! » Partout où il passait et à tous ceux qui venaient le consulter, il laissait une profonde impression, celle d’un homme qui ne vivait que pour Dieu et pour la défense de la vérité de l’Évangile. Prenant pour modèles les prophètes et les Pères de l’Église, il soutenait de manière inébranlable que dans l’Orthodoxie tout est évangélique : la foi, la prière, l’ascèse, l’office divin, les saints Mystères et les saintes vertus. Toute la Tradition de l’Église n’est rien d’autre que l’Évangile vécu.  Dans la tourmente qui précéda la Seconde Guerre mondiale, il se refusa à entrer dans le jeu des passions politiques, mais proclama la vérité évangélique, sans crainte des pressions humaines. C’est ainsi qu’il défendit sans ambiguïté la cause de l’Orthodoxie, lorsque le Vatican voulut imposer le catholicisme comme religion d’état en Yougoslavie, au moyen d’un concordat (1937). Juste avant l’explosion de la guerre, il eut une vision du Christ crucifié, lui annonçant les épreuves redoutables qui attendaient son peuple. Pendant l’occupation allemande, la Faculté de Théologie ayant été fermée, il résida dans divers monastères et s’occupa à traduire de nombreux textes patristiques et à rédiger ses commentaires des Saintes Écritures. Une de ses œuvres majeures, réalisée à cette époque mais qui ne put être publiée entièrement que vers la fin de sa vie, fut sa collection des Vies des saints, en douze volumes. Pour le Père Justin, les Vies des saints sont « les dogmes traduits dans la vie » et constituent la véritable « encyclopédie de l’Orthodoxie ».  Avec l’instauration du pouvoir communiste, en 1945, le Père Justin fut chassé de l’Université, en même temps que deux cents autres professeurs. Arrêté, puis emprisonné, il échappa de peu à la condamnation à mort comme « ennemi du peuple », grâce à l’intervention du patriarche Gabriel, qui venait d’être libéré du camp de Dachau. Exclu de l’enseignement et privé de tous ses droits, après avoir résidé dans divers monastères, il vécut jusqu’à la fin de ses jours (1948-1979), pratiquement en réclusion dans le petit couvent féminin de Tchélié, près de Valiévo, dédié à l’Archange Michel. Même là, les communistes ne le laissèrent point en paix, et il était souvent convoqué en ville pour des interrogatoires. À l’occasion d’événements importants pour la vie de l’Église, le Père Justin tenta à plusieurs reprises de se rendre à Belgrade, mais il fut chaque fois reconduit de force au monastère. La lumière du Christ ne pouvait cependant rester dissimulée sous le boisseau et, durant toutes ces années, nombreux étaient ceux qui, tant de Serbie que de l’étranger, venaient consulter le saint confesseur. Cette réclusion au monastère de Tchélié devint aussi pour le Père Justin l’occasion de nouvelles ascensions spirituelles. Il jeûnait strictement, et toute sa vie était concentrée sur l’office divin et sur la Divine Liturgie, qui, selon ses propres paroles est « l’échelle, le pont qui mène au Ciel ». Lorsqu’il célébrait, il commémorait d’innombrables noms et versait des larmes abondantes. Dans les années 1960, alors que certains orthodoxes s’engageaient sur la voie d’un relativisme ecclésiologique, allant jusqu’à nier l’unicité de l’Église du Christ au nom de la charité chrétienne, le Père Justin se fit de nouveau le porte-parole de la conscience de l’Église, pour dénoncer ces dangers menaçant l’Orthodoxie. Peu avant son bienheureux trépas, il eut la joie de voir la publication de ses Vies de saints et du dernier volume de sa Dogmatique, concernant l’Ecclésiologie. L’œuvre du Père Justin, constituée de quarante tomes, dont trente ont été publiés à ce jour, couvre tous les domaines de la vie ecclésiale, mais c’est peut-être dans ses commentaires sur le Nouveau Testament qu’il a exprimé le plus pleinement son amour ardent du Christ. Parvenu au terme de son parcours terrestre, ce Jérémie serbe s’endormit, à l’issue d’une courte maladie, le 7 avril 1979, jour anniversaire de sa naissance. Depuis lors, la tombe du Père Justin est devenue un lieu de pèlerinage, rassemblant les orthodoxes de nombreux pays, et des miracles y ont été accomplis par ses prières.

TROPAIRES ET KONDAKIA DU JOUR

Tropaire de saint Justin le Philosophe, ton 4

Ton Martyr, Seigneur, pour le combat qu’il a mené * a reçu de toi, notre Dieu, la couronne d’immortalité; * animé de ta force, il a terrassé les tyrans * et réduit à l’impuissance l’audace des démons; * par ses prières sauve nos âmes, ô Christ notre Dieu.

Tropaire de saint Justin de Tchélié, ton 8

La suavité de l’Orthodoxie et le nectar de la sagesse, ô vénérable Père, tu les déversas dans les cœurs des fidèles, telle une richesse inestimable ; par ta vie et ton enseignement, tu te montras comme un livre vivant de l’Esprit, ô Justin le sage en Dieu, prie sans cesse le Verbe divin, afin qu’Il déifie ceux qui t’honorent.

Kondakion de saint Justin le Philosophe, ton 2

Le héraut véritable de la piété, * l’orateur illustre des mystères divins, * Justin le philosophe, acclamons-le * avec des éloges, car il a, * par la force de la sagesse et de la grâce, rendu plus clair * l’exposé de notre foi; * et pour tous il implore la divine rémission.

Kondakion de saint Justin de Tchélié, ton 8

Par les vertus, divino-humainement tu ornas ta vie, tu eus le Dieu-homme pour mesure de tout et tu atteignis par Lui les sommets de la théologie ; te tenant maintenant auprès de Lui pour toute l’éternité, donne-nous la Grâce par tes saintes prières, nous qui t’acclamons ainsi avec foi : réjouis-toi Père sage en Dieu !

ÉPÎTRE DU JOUR

Rom. IV 4-12

Or, à celui qui fait une œuvre, le salaire est imputé, non comme une grâce, mais comme une chose due ; et à celui qui ne fait point d’œuvre, mais qui croit en celui qui justifie l’impie, sa foi lui est imputée à justice. De même David exprime le bonheur de l’homme à qui Dieu impute la justice sans les œuvres : Heureux ceux dont les iniquités sont pardonnées, Et dont les péchés sont couverts ! Heureux l’homme à qui le Seigneur n’impute pas son péché ! Ce bonheur n’est-il que pour les circoncis, ou est-il également pour les incirconcis ? Car nous disons que la foi fut imputée à justice à Abraham. Comment donc lui fut-elle imputée ? Était-ce après, ou avant sa circoncision ? Il n’était pas encore circoncis, il était incirconcis. Et il reçut le signe de la circoncision, comme sceau de la justice qu’il avait obtenue par la foi quand il était incirconcis, afin d’être le père de tous les incirconcis qui croient, pour que la justice leur fût aussi imputée, et le père des circoncis, qui ne sont pas seulement circoncis, mais encore qui marchent sur les traces de la foi de notre père Abraham quand il était incirconcis.

ÉVANGILE DU JOUR

Matth. VII,15-21

Gardez-vous des faux prophètes. Ils viennent à vous en vêtement de brebis, mais au dedans ce sont des loups ravisseurs. Vous les reconnaîtrez à leurs fruits. Cueille-t-on des raisins sur des épines, ou des figues sur des chardons ? Tout bon arbre porte de bons fruits, mais le mauvais arbre porte de mauvais fruits. Un bon arbre ne peut porter de mauvais fruits, ni un mauvais arbre porter de bons fruits. Tout arbre qui ne porte pas de bons fruits est coupé et jeté au feu. C’est donc à leurs fruits que vous les reconnaîtrez. Ceux qui me disent : Seigneur, Seigneur ! n’entreront pas tous dans le royaume des cieux, mais celui-là seul qui fait la volonté de mon Père qui est dans les cieux.

À propos de l'auteur

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Jivko Panev

Jivko Panev, cofondateur et journaliste sur Orthodoxie.com. Producteur de l'émission 'Orthodoxie' sur France 2 et journaliste.
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