Jour de jeûne
Saint Athanase du Mont-Athos (1000) ; saint Mars, évêque de Nantes (VIème s.) ; saint Lampade d’Irénopolis en Isaurie (Xème s.) ; invention des reliques de saint Serge de Radonège (1421) ; saintes Anne et Cyrilla, martyres à Cyrène (304) ; saints nouveaux martyrs de Russie : Gennade Zdorovtsev, prêtre, moine Agapet Taube, confesseur (1936).
SAINT ATHANASE DU MONT ATHOS
Cet astre brillant dans le firmament des saints Pères naquit vers l’an 930, à Trébizonde (Pont), de parents nobles, et fut nommé Abraamios au saint baptême. Resté orphelin de père et de mère peu après sa naissance, il fut recueilli par une parente de sa mère, épouse d’un des personnages les plus en vue de Trébizonde, Kanita. Enfant, il ne s’adonnait pas aux jeux turbulents, mais emmenait ses compagnons dans la forêt ou près d’une grotte et jouait le rôle d’higoumène. Ses rapides progrès dans les études faisaient l’admiration de ses proches et, à peine parvenu à l’âge adolescent, il fut remarqué par un haut fonctionnaire impérial en mission dans la ville, qui le prit en affection et l’emmena avec lui à Constantinople. Accueilli dans la maison du stratège Zéphinézer, il poursuivit ses études sous la direction d’un maître remarquable, Athanase, et fut même bientôt promu professeur adjoint, malgré son jeune âge. Son application aux Lettres ne lui faisait cependant pas négliger la vie ascétique, qu’il aimait depuis son enfance, et il se montrait moine avant l’heure et lutteur avant même d’entrer dans l’arène. Il fuyait la riche table du général et échangeait les victuailles qu’on lui faisait parvenir par deux serviteurs, contre un pain d’orge, qu’il mangeait de deux jours en deux jours. Il ne s’allongeait pas pour dormir et luttait contre le sommeil en s’arrosant le visage d’eau froide. Quant aux vêtements, il les distribuait aux pauvres, et lorsqu’il n’avait plus rien à donner, il se retirait dans un coin pour se dépouiller de ses sous-vêtements. Des élèves accouraient de partout vers Abraamios, et d’autres désertaient l’établissement de son maître, non seulement à cause de sa science et de ses capacités d’enseignement, mais surtout en raison de son affabilité, de sa vie sainte et de son aspect divin. L’empereur Constantin VII Porphyrogénète le transféra dans un autre établissement ; mais, comme les disciples s’attachaient à lui plus fort que le lierre au chêne, pour ne pas être cause de scandale et de rivalité avec son ancien maître, Abraamios — qui considérait les honneurs comme une honte — décida de renoncer à la carrière professorale, et avec elle à tous les soucis du siècle.
De retour à Constantinople, après un séjour de trois ans dans la région de la mer Égée, en compagnie du stratège, celui-ci le mit en relation avec son parent, saint Michel Maléïnos [12 juil.], higoumène de la laure du mont Kyminas, qui était bien connu de tous les gens de qualité. Conquis par cet homme divin, le jeune homme lui dévoila son désir d’embrasser la vie monastique. Vers la fin de cet entretien, se présenta chez saint Michel, son neveu, Nicéphore Phocas, alors stratège du thème des Anatoliques , qui se lia aussitôt d’une grande affection, mêlée d’admiration, pour Abraamios. Celui-ci, ayant trouvé le père spirituel que son cœur désirait, suivit saint Michel au mont Kyminas, où il reçut rapidement le Petit Habit sous le nom d’Athanase. L’ancien, ayant discerné que son jeune et ardent disciple était déjà avancé dans les pratiques ascétiques, et désirant faire de lui un soldat de Jésus-Christ aguerri dans l’obéissance, lui refusa l’autorisation de manger une fois par semaine, mais seulement tous les trois jours, et il lui ordonna de dormir sur une natte, et non sur un siège comme il en avait l’habitude. Athanase, qui avait reçu les charges de copiste et d’aide-sacristain, se soumettait volontiers à tout ce qui contrecarrait sa volonté propre, si bien que ses condisciples émerveillés le surnommèrent « fils de l’obéissance ». Il montra un tel zèle qu’en moins de quatre ans, il atteignit la pureté de l’intellect et, gratifié par Dieu des arrhes de la contemplation, il fut jugé digne de s’engager dans le stade de la vie hésychaste. Michel lui permit de se retirer dans une petite cellule érémitique, à un mille environ du monastère, de s’y nourrir de pain sec et d’eau, tous les deux jours, et d’y passer la nuit entière dans la veille. C’est dans cette retraite que Nicéphore Phocas, en visite au Kyminas, vint le trouver et lui dévoila son intention de devenir moine en sa compagnie, dès que les circonstances le lui permettraient. Peu après, saint Michel ayant laissé entendre à ses proches qu’Athanase deviendrait son héritier dans la grâce et la direction des âmes, certains moines, croyant qu’il voulait faire de lui son successeur dans l’higouménat, commencèrent à venir importuner le jeune ascète par leurs flatteries. Brûlé par l’amour de l’hésychia et repoussant tout honneur, le saint choisit une fois de plus la fuite et, n’emportant avec lui que ses vêtements, deux livres et la cuculle de son père spirituel, il se rendit directement au Mont Athos, qu’il avait admiré depuis l’île de Lemnos lors de son séjour en Égée, et où ne vivaient alors guère que des ermites, habitant dans des huttes de branchages, et qui, étrangers à tout souci, ne possédaient rien et ne travaillaient pas la terre. Après avoir admiré leur mode de vie en une courte visite, il se rangea sous la direction d’un ancien fort simple, qui résidait dans la partie nord de la péninsule, le Zygos, en se faisant passer pour un marin victime d’un naufrage, du nom de Barnabé ; et pour écarter tout soupçon sur son origine, il feignit d’être illettré et incapable d’apprendre même l’alphabet. Entre temps, Nicéphore Phocas, qui avait reçu le titre de Domestique des Scholes, faisait rechercher partout Athanase. Il écrivit même au juge de Thessalonique, lui demandant d’enquêter sur le Mont Athos. Celui-ci s’adressa au prôtos Étienne, qui lui répondit ignorer la présence d’un tel moine. Le jour de la Nativité (958 ou 959), lors de la vigile qui rassemblait tous les Athonites dans la modeste église du Prôtaton à Karyès, le prôtos reconnut à la noblesse d’allure du jeune Barnabé, le moine qu’on lui avait décrit, et il lui ordonna de faire la lecture de l’homélie de saint Grégoire le Théologien. Athanase commença par ânonner comme un enfant, mais le prôtos lui ayant intimé l’ordre de lire « comme il le savait », ne pouvant plus dissimuler, il se mit à lire de telle manière que tous les moines admiratifs vinrent se prosterner devant lui. Le plus en vue d’entre eux, Paul de Xiropotamou [28 juil.], prédit que celui qui était venu après eux sur la Montagne les devancerait dans le Royaume de Dieu, et que tous les moines allaient se ranger sous sa direction. Le prôtos prit Athanase à l’écart et, ayant appris toute la vérité, il lui promit de ne pas le trahir et lui assigna une cellule solitaire, à trois stades de Karyès, où il pourrait converser sans distraction avec Dieu seul. Le saint y subvenait à ses besoins en copiant des livres, et il montrait une telle dextérité dans cette activité qu’il recopiait, d’une écriture élégante et soignée, un Psautier par semaine.
La lampe ne pouvait cependant rester longtemps cachée sur la montagne, et quand le frère de Nicéphore, Léon Phocas, se rendit en pèlerinage à l’Athos pour rendre grâces à Dieu après une campagne victorieuse contre les barbares, il réussit à découvrir Athanase. Les moines athonites, constatant que le bienheureux était si cher à des personnages aussi haut placés, lui demandèrent d’intercéder auprès de Léon, pour que l’église du Prôtaton fût reconstruite et agrandie. Il obtint aussitôt satisfaction et, après avoir pris congé de son puissant ami, il retourna dans sa solitude. Mais, comme les moines venaient sans cesse lui demander conseil, il prit de nouveau la fuite, en quête de l’hésychia, et se retira sur le cap sud de la Montagne, dans un endroit désert, battu par les vents, Mélana. Il y fut rudement éprouvé par le démon, qui déclenchait contre l’ascète toutes ses machinations, et surtout la guerre de l’acédie, l’épreuve particulière des ermites. L’Ennemi lui provoquait une telle sécheresse spirituelle que, parvenu presque au découragement complet, Athanase souhaitait quitter ce lieu ; mais dans un suprême effort, il décida cependant de prendre patience jusqu’à la fin de l’année. Le dernier jour venu, alors qu’il se préparait à quitter Mélana, n’ayant trouvé aucun apaisement dans l’épreuve, une lumière céleste le pénétra soudain, le remplissant d’une joie ineffable et lui procurant le don des larmes, qu’il versa dès lors, sans effort, jusqu’à la fin de ses jours, c’est pourquoi ce lieu lui devint aussi cher qu’il lui était haïssable auparavant. Sur ces entrefaites, Nicéphore Phocas, qui avait reçu le commandement de toute l’armée byzantine pour délivrer la Crète des Arabes, lesquels épouvantaient toutes les côtes par leurs raids de piraterie, envoya des messagers dans les centres monastiques du temps — et particulièrement à l’Athos, car il avait appris par son frère qu’Athanase s’y trouvait — demandant qu’on lui envoie des moines capables de l’aider par leurs prières. Les Pères de la Sainte Montagne réussirent à vaincre les résistances de l’amant de l’hésychia, en lui rappelant que plusieurs moines se trouvaient prisonniers des Arabes ; et Athanase arriva en Crète, en compagnie d’un ancien, nommé Théodose, peu après l’éclatante victoire de Nicéphore (961). Transporté par la joie de retrouver son père spirituel, celui-ci lui confirma qu’il avait toujours l’intention de se retirer du monde, et il le supplia de commencer la fondation d’un monastère près de son ermitage pour les abriter. L’homme de Dieu, estimant que travailler à son propre salut était déjà une assez lourde charge, et fuyant toute occasion de soucis et de dissipation, refusa cette proposition et repartit pour l’Athos. Nicéphore envoya à sa suite un de ses proches, Méthode, qui devint ensuite higoumène de la laure du mont Kyminas, et ce dernier réussit à convaincre Athanase d’entreprendre la fondation. Avec l’or offert par Nicéphore, on put rapidement construire un oratoire dédié au Précurseur avec des cellules érémitiques destinées à Athanase et Nicéphore ; et, après le départ de Méthode au bout de six mois, on commença l’édification d’une grande église de la Mère de Dieu et de la Laure, dite « de Mélana » , à l’emplacement même où Athanase avait été délivré de l’acédie par la vision de la lumière divine. Athanase ayant chassé par sa prière le démon qui avait paralysé les ouvriers, ceux-ci décidèrent de devenir moines et furent tonsurés par le saint qui, avant de les accepter comme disciples, alla recevoir le Grand Habit des mains d’un ermite des environs, Isaïe. Cette année-là (962-963), une terrible famine frappa tout l’Empire, si bien que le ravitaillement de la Laure se trouva interrompu. Athanase ayant décidé d’aller demander conseil aux anciens à Karyès, rencontra en chemin la Mère de Dieu, qui fit jaillir devant lui une source d’eau abondante, et elle lui recommanda de ne pas s’inquiéter, car elle assumerait elle-même, pour la suite des temps, la charge d’« Économe du monastère » . Et lorsque le saint rentra au monastère, la Toute-Sainte lui montra les réserves pleines. Par la grâce de Dieu et la prière du saint, les travaux avancèrent rapidement, malgré les grandes difficultés dues à cet endroit escarpé, plein de pierres et de broussailles épaisses. À l’église, munie de deux chœurs en forme de croix , furent ajoutés un réfectoire , une hôtellerie, un hôpital muni d’un bain, un aqueduc, un moulin et tout ce qui était nécessaire à la vie d’un grand monastère. Le nombre des moines croissant rapidement, le saint veillait aussi à l’organisation de la communauté, en réglant dans le plus grand détail, tant les offices liturgiques que les observances quotidiennes, selon le modèle du Stoudion, de manière à ce que tout y soit accompli dignement et dans l’ordre, et que les moines, dépouillés de tout bien et de leur volonté propre, puissent persévérer d’un seul cœur et sans souci dans la glorification permanente de Dieu. Pour saint Athanase, la vie au monastère consiste à : « Regarder en commun le but de la vie, c’est-à-dire le salut, et former dans la vie cénobitique un seul cœur et une seule volonté. Que d’un commun désir toute la fraternité ne forme qu’un seul corps constitué de plusieurs membres ». Tout semblait aller pour le mieux, quand parvint la nouvelle du couronnement de Nicéphore sur le trône impérial (16 août 963). Désemparé par ce qu’il estimait être une trahison, Athanase, sous prétexte de se rendre à Constantinople, s’embarqua sur-le-champ avec trois disciples. Mais à peine éloigné de la côte, il envoya l’un d’eux auprès du souverain, porteur d’une lettre annonçant sa démission, chargea le second, Théodote, de porter cette nouvelle à la Laure, et il se dirigea avec le troisième, Antoine, vers l’île de Chypre. Ils s’y présentèrent au monastère des « Prêtres », prétendant être des pèlerins qui, ayant renoncé à gagner la Terre Sainte occupée par les Sarrasins, demandaient à vivre en ascètes à proximité. La joie de Nicéphore en accueillant l’envoyé de son père spirituel fut rapidement ternie à la lecture de sa lettre, et il fit aussitôt rechercher Athanase. Pendant ce temps, la Laure, privée de son higoumène, périclitait rapidement, et les moines orphelins ne pouvaient trouver ni consolation ni harmonie. Quand les deux fugitifs apprirent que l’higoumène du monastère des Prêtres avait été informé que l’empereur recherchait deux moines correspondant à leur signalement, ils prirent la fuite. Les vents les ayant repoussés sur le littoral de l’Asie Mineure, près d’Attalia, Athanase eut une vision lui révélant la situation lamentable dans laquelle se trouvait la Laure et lui annonçant qu’elle était promise, sous sa direction, à un brillant avenir. Ils n’avaient pas plutôt décidé de prendre le chemin du retour que, par un effet de la divine providence, ils rencontrèrent Théodote, qui s’était mis en route pour Chypre afin d’y trouver le saint et de lui rapporter quelle était la situation à l’Athos. À son retour au monastère, Athanase fut reçu par ses moines comme le Christ entrant à Jérusalem, et la Laure reprit rapidement vie. Il se rendit peu après à Constantinople. L’empereur Nicéphore, confus, n’osa pas le recevoir avec la pompe habituelle, et c’est vêtu simplement qu’il prit le saint à part, dans sa chambre, pour lui présenter ses excuses et l’inciter à prendre patience jusqu’à ce que les circonstances lui permettent de réaliser ses promesses. Athanase, ayant reçu de Dieu la révélation que Nicéphore allait mourir sur le trône, l’exhorta à la justice et à la mansuétude, puis il prit congé, muni d’un chrysobulle qui accordait à la Laure le titre de monastère impérial, avec une rente annuelle considérable, et lui cédait le monastère de Saint-André de Péristéra, dans la région de Thessalonique, comme dépendance (métochion). De retour à l’Athos, le saint reprit la direction des travaux. Au cours de l’aménagement du port, il fut gravement blessé au pied et dut rester alité pendant trois ans, mais il tira profit de cette immobilité pour se consacrer davantage à Dieu et à la direction spirituelle des frères. À la mort de Nicéphore Phocas, assassiné par Jean Tzimiskis qui monta alors sur le trône (969-976), comme le nouveau souverain se trouvait fort mal disposé envers le saint à cause de son attachement à son prédécesseur, certains ermites athonites, hommes simples et attachés à leur forme ancienne de vie, accusèrent Athanase de transformer la Sainte Montagne en un lieu mondain par ses constructions, ses plantations et l’établissement d’un grand monastère. L’empereur convoqua Athanase à Constantinople, mais le saint fit sur lui si grande impression, que Tzimiskis changea du tout au tout son attitude à son égard et lui accorda par chrysobulle une rente double de la précédente. Puis il envoya à l’Athos Euthyme du Stoudion, avec pour mission d’apaiser le conflit provoqué par le diable et de donner à la Sainte Montagne sa première organisation officielle (972) . À partir de ce moment, on vit des monastères cénobitiques remplacer les cabanes, et les ermites réconciliés avec les cénobites échanger leurs biens propres : les uns offraient aux cénobites leur application à l’hésychia et à la prière continuelle, tandis que les autres procuraient aux ermites l’ordre et l’harmonie sous la direction de l’higoumène, placé au centre de la communauté comme image du Christ. On voyait des ermites abandonner leur désert, des higoumènes renoncer à leur monastère et même des évêques démissionner, pour venir se ranger sous la direction d’Athanase. Des disciples accouraient à l’Athos, venus d’Italie, de Calabre, d’Amalfi, d’Ibérie et d’Arménie. Et des anachorètes de renom, comme le bienheureux Nicéphore le Nu, préféraient renoncer à leurs austérités, pour jouir de l’enseignement du saint higoumène et trouver la perfection par l’ascèse de l’humilité et de la soumission. La prière du saint était si puissante contre les démons que ces derniers entouraient invisiblement la Montagne, sans pouvoir porter atteinte à ses moines ; mais ils continuaient néanmoins de s’attaquer à Athanase lui-même. Un jour, ils suggérèrent à un moine négligent, qui avait pris en grippe la tension ascétique du saint, d’attenter à sa vie. Il se présenta de nuit à la porte de la cellule de l’higoumène ; mais dès qu’Athanase sortit et l’embrassa paternellement, le malheureux laissa choir son glaive et, tombant à ses pieds, confessa son funeste dessein. Le saint lui pardonna aussitôt et lui témoigna dès lors une plus grande affection qu’à tous ses autres disciples. Se faisant tout pour tous, envers les moines du coenobium, comme envers les ascètes des alentours ou les pèlerins venus de toutes parts pour trouver à la Laure la guérison de l’âme ou du corps, saint Athanase n’en cessait cependant pas son entretien permanent avec Dieu ainsi que ses combats ascétiques. En période de jeûne, il ne mangeait rien de toute la semaine, et en temps ordinaire son régime était celui des moines soumis aux plus sévères pénitences. Quand il assistait au repas, il distribuait sa part, de sorte que, sans qu’on s’en rendît compte, il ne mangeait guère plus que l’antidoron distribué à la fin de la Liturgie. Tout le temps qu’il ne passait pas à l’enseignement ou à la confession de ses disciples, il le consacrait à la prière, toujours baignée de larmes, et son mouchoir, qui en était toujours trempé, guérit à plusieurs reprises des malades. Chef et guide à l’autorité qui ne souffrait aucune contestation, il se faisait, à l’image du Christ, le serviteur de chacun, et portait une attention toute particulière aux malades, assumant lui-même les tâches qui répugnaient aux autres moines. Il considérait les lépreux comme le plus grand trésor de la Laure et les confiait à ses disciples les plus éprouvés. Quand un des moines mourait, le saint se rendait près du corps et fondait en larmes — non pas des sanglots d’émotion, mais plutôt des larmes d’intercession pour le salut du défunt — et, en se relevant, le visage empourpré comme par le feu, il rendait gloire à Dieu de Lui avoir offert son disciple en sacrifice agréable. La communauté, d’abord limitée à quatre-vingts moines par l’empereur, fut portée au nombre de cent vingt vers la fin de la vie d’Athanase, et elle ne cessait d’augmenter. Le saint restait cependant pour chacun un père. Il encourageait ses moines au travail manuel pour éviter l’oisiveté, mère de tous les vices, et montrait l’exemple en prenant la tête dans les travaux pénibles, qui n’étaient jamais privés du chant des psaumes et du sel de la Parole divine. Il enseignait que le but de la vie monastique, dans le coenobium, restait le même que celui des ermites : « Se préparer à l’illumination du Saint-Esprit, par la purification de l’intellect, de l’âme et du corps » . Un jour, le moine Gérasime se rendit dans un kellion où le saint s’était retiré, et vit son visage ardent comme une fournaise. Il recula d’abord, effrayé, et quand il s’approcha de nouveau, il le contempla radieux et entouré d’un orbe de lumière. Comme il avait poussé un cri qui trahit sa présence, Athanase lui fit jurer de ne révéler à personne ce qu’il avait vu. Cette familiarité acquise auprès de Dieu, procurait au saint une divine sagesse, aussi bien dans l’enseignement de la communauté, que dans la correction des fautes de ses moines. Quand il imposait une pénitence à des frères, il s’y soumettait aussi lui-même, et bien qu’il eût en public une attitude austère et magistrale, quand il se trouvait avec ses disciples, en privé ou pour un travail extérieur, il était toujours simple, enjoué et d’une grande douceur. Il guérit de nombreux malades, après avoir eu soin de leur appliquer des plantes médicinales pour cacher la puissance de sa prière. Et nombre de ceux qui venaient lui confesser quelque passion persistante, comme la colère ou l’envie, s’en retournaient délivrés, après que le saint les eut touchés de son bâton pastoral, en disant : « Va en paix, tu ne souffres plus d’aucun mal ! » Pour répondre aux besoins de la communauté, on entreprit d’agrandir l’église et, les travaux ayant avancé rapidement grâce aux dotations impériales et aux dons d’amis du Christ, il ne restait plus que la coupole à terminer. Le saint, qui avait reçu de Dieu la révélation de sa fin prochaine, après avoir exhorté ses disciples dans une dernière catéchèse, revêtit ses vêtements solennels, se couvrit de la cuculle de saint Michel Maléïnos, qu’il ne portait que dans les grandes occasions, et fit l’ascension de l’échafaudage pour inspecter les travaux (5 juillet entre 997 et 1000). Soudain la coupole s’effondra, entraînant le saint et les six autres moines qui l’accompagnaient. Cinq d’entre eux moururent sur le coup, seuls Athanase et le maçon Daniel restèrent vivants, écrasés sous les décombres. Pendant trois heures, on put entendre la voix du saint murmurer : « Gloire à Toi ô Dieu. Seigneur Jésus-Christ, viens à mon aide ! » Quand les moines affolés réussirent à le dégager, ils le trouvèrent mort, les mains en croix sur la poitrine, n’ayant qu’une seule blessure à la jambe. Son corps resta exempt de corruption et comme endormi pendant trois jours, jusqu’à ce que tous les athonites, au nombre d’environ trois mille, se réunissent pour célébrer les funérailles de leur Père et patriarche. De sa blessure s’écoula alors du sang frais, qu’on s’empressa de recueillir et qui accomplit de nombreuses guérisons. Par la suite, saint Athanase n’a pas cessé d’intervenir miraculeusement pour ceux qui venaient vénérer son tombeau, devant lequel brûle perpétuellement une veilleuse. Quand la Grande Lavra célébra son retour à la vie cénobitique, le 5 juillet 1981, après des siècles passés dans l’idiorythmie, un liquide parfumé suinta soudain à la surface de la vitre protégeant l’icône qui recouvre le tombeau, manifestant la satisfaction du saint.
(Tiré du Synaxaire du hiéromoine Macaire de Simonos Petras)
TROPAIRES ET KONDAKIA DU JOUR
Tropaire de saint Athanase, ton 3
La vie que tu as menée, Athanase, dans la chair * a l’admiration des armées angéliques * te voyant marcher corporellement * vers les combats invisibles * et massacrer les phalanges des démons; * c’est pourquoi le Seigneur t’a récompensé de ses dons abondants; * illustre Père, prie le Christ notre Dieu * d’accorder à nos âmes la grande miséricorde.
Tropaire de saint Serge, ton 8
En ton âme dès la jeunesse tu as reçu le Christ et plus que tout désiras t’éloigner des mondaines vanités; courageusement tu habitas le désert, où tu fis croître les fils de l’obéissance, les fruits de l’humilité; devenu la demeure de la sainte Trinité, tu fis briller tes miracles sur tous les fidèles s’approchant de toi et répandis sur tous en abondance les guérisons; vénérable Père Serge, prie le Christ notre Dieu pour le salut de nos âmes.
Kondakion de saint Athanase, ton 8
Comme excellent contemplateur des êtres immatériels * et comme un authentique maître en la pratique des vertus * nous t’acclamons, nous tes brebis, nous écriant: * auprès du Seigneur ne cesse pas d’intercéder * pour qu’il sauve des épreuves et du malheur les fidèles te chantant: * Réjouis-toi, saint Athanase de l’Athos.
Kondakion de saint Serge, ton 8
En ce jour se sont levées comme soleil étincelant au sortir de la terre tes reliques sacrées, trouvées intactes et comme fleurs embaumant; elles resplendissent d’une multitude de miracles, font sourdre pour les fidèles toutes sortes de guérisons réjouissant le troupeau choisi que tu as sagement rassemblé et pour lequel en présence de la Trinité tu intercèdes, afin que tous puissent te chanter: Réjouis-toi, Père Serge aux-divines pensées.
Rom. V, 17-VI, 2
Si par l’offense d’un seul la mort a régné par lui seul, à plus forte raison ceux qui reçoivent l’abondance de la grâce et du don de la justice régneront-ils dans la vie par Jésus Christ lui seul. Ainsi donc, comme par une seule offense la condamnation a atteint tous les hommes, de même par un seul acte de justice la justification qui donne la vie s’étend à tous les hommes. Car, comme par la désobéissance d’un seul homme beaucoup ont été rendus pécheurs, de même par l’obéissance d’un seul beaucoup seront rendus justes. Or, la loi est intervenue pour que l’offense abondât, mais là où le péché a abondé, la grâce a surabondé, afin que, comme le péché a régné par la mort, ainsi la grâce régnât par la justice pour la vie éternelle, par Jésus Christ notre Seigneur. Que dirons-nous donc ? Demeurerions-nous dans le péché, afin que la grâce abonde ? Loin de là ! Nous qui sommes morts au péché, comment vivrions-nous encore dans le péché ?
Galates V, 22 – VI,2 (Saints Serge et Athanase)
Frères, le fruit de l’Esprit, c’est l’amour, la joie, la paix, la patience, la bonté, la mansuétude, la confiance dans les autres, la douceur, la tempérance ; la loi n’est pas contre ces choses. Ceux qui sont à Jésus Christ ont crucifié la chair avec ses passions et ses désirs. Si nous vivons par l’Esprit, marchons aussi selon l’Esprit. Ne cherchons pas une vaine gloire, en nous provoquant les uns les autres, en nous portant envie les uns aux autres. Frères, si un homme vient à être surpris en quelque faute, vous qui êtes spirituels, redressez-le avec un esprit de douceur. Prends garde à toi-même, de peur que tu ne sois aussi tenté. Portez les fardeaux les uns des autres, et vous accomplirez ainsi la loi de Christ.
ÉVANGILE DU JOUR
Lc VI, 17-23 (Saints Serge et Athanase)
Il descendit avec eux, et s’arrêta sur un plateau, où se trouvaient une foule de ses disciples et une multitude de peuple de toute la Judée, de Jérusalem, et de la contrée maritime de Tyr et de Sidon. Ils étaient venus pour l’entendre, et pour être guéris de leurs maladies. Ceux qui étaient tourmentés par des esprits impurs étaient guéris. Et toute la foule cherchait à le toucher, parce qu’une force sortait de lui et les guérissait tous. Alors Jésus, levant les yeux sur ses disciples, dit: Heureux vous qui êtes pauvres, car le royaume de Dieu est à vous! Heureux vous qui avez faim maintenant, car vous serez rassasiés ! Heureux vous qui pleurez maintenant, car vous serez dans la joie! Heureux serez-vous, lorsque les hommes vous haïront, lorsqu’on vous chassera, vous outragera, et qu’on rejettera votre nom comme infâme, à cause du Fils de l’homme ! Réjouissez-vous en ce jour-là et tressaillez d’allégresse, parce que votre récompense sera grande dans le ciel; car c’est ainsi que leurs pères traitaient les prophètes.
Matth. IX, 14-17
Alors les disciples de Jean vinrent auprès de Jésus, et dirent: Pourquoi nous et les pharisiens jeûnons-nous, tandis que tes disciples ne jeûnent point? Jésus leur répondit: Les amis de l’époux peuvent-ils s’affliger pendant que l’époux est avec eux? Les jours viendront où l’époux leur sera enlevé, et alors ils jeûneront. Personne ne met une pièce de drap neuf à un vieil habit; car elle emporterait une partie de l’habit, et la déchirure serait pire. On ne met pas non plus du vin nouveau dans de vieilles outres; autrement, les outres se rompent, le vin se répand, et les outres sont perdues; mais on met le vin nouveau dans des outres neuves, et le vin et les outres se conservent.