Les femmes dans l’entourage de Jésus

Dans nos articles précédents consacrés aux disciples de Jésus, nous avons étudié les Douze apôtres et les Soixante-dix disciples. Aujourd’hui, nous nous intéressons à un autre groupe essentiel : les femmes qui ont suivi et servi Jésus tout au long de son ministère terrestre. Leur présence, bien que discrète dans les récits évangéliques, est néanmoins significative et porteuse de sens.

Les femmes disciples et leur ministère de διακονέω

Dans les récits des quatre Évangiles apparaissent à plusieurs reprises des figures de femmes qui ont suivi Jésus.

Matthieu rapporte que près de Sa croix il y avait (…) plusieurs femmes qui regardaient de loin ; qui avaient accompagné Jésus depuis la Galilée, pour Le servir (Mt 27:55). Chez Marc, le texte parallèle nous donne plus de détails sur ces femmes : Il y avait aussi des femmes qui regardaient de loin. Parmi elles étaient Marie de Magdala, Marie, mère de Jacques le Mineur et de Joses, et Salomé, qui Le suivaient et Le servaient lorsqu’Il était en Galilée, et plusieurs autres qui étaient montées avec Lui à Jérusalem (Mc 15:40-41).

Dans les deux cas est employé le verbe « servir » (διακονέω), indiquant que la tâche principale des femmes était d’assister de diverses manières Jésus et Ses disciples au quotidien.

L’Évangile de Luc mentionne un autre rôle important joué par les femmes dans l’entourage de Jésus. C’est encore une fois le verbe « servir, assister » qui est utilisé :

Ensuite, Jésus allait de ville en ville et de village en village, prêchant et annonçant la bonne nouvelle du Royaume de Dieu. Les douze étaient avec Lui et quelques femmes qui avaient été guéries d’esprits malins et de maladies : Marie, dite de Magdala, de laquelle étaient sortis sept démons, Jeanne, femme de Chuza, intendant d’Hérode, Suzanne, et plusieurs autres, qui L’assistaient de leurs biens. (Lc 8:1-3)

L’expression assistaient de leurs biens indique que certaines des femmes qui suivaient Jésus engageaient leurs ressources pour soutenir Son œuvre.

L’une des trois femmes mentionnées, à savoir la femme de l’intendant, devait être relativement fortunée. Ce n’est pas un hasard si, parmi les femmes citées dans les Évangiles, c’est la seule dont l’évangéliste ait jugé nécessaire de signaler le statut social.

Marthe et Marie : les archétypes des deux modes de vie chrétienne

Dans les deux passages de l’Évangile de Jean où il est question de Marthe, la sœur de Lazare, le verbe « servir » qui lui est appliqué renvoie au service à table ainsi qu’à la préparation de la nourriture (Jn 10:40 ; 12:2). Marthe tient le même rôle dans l’épisode rapporté par Luc :

Comme Jésus était en chemin avec Ses disciples, Il entra dans un village, et une femme, nommée Marthe, Le reçut dans sa maison. Elle avait une sœur, nommée Marie, qui, s’étant assise aux pieds du Seigneur, écoutait Sa parole. Marthe, occupée à divers soins domestiques, survint et dit : Seigneur, cela ne Te fait rien que ma sœur me laisse seule pour servir ? Dis-lui donc de m’aider. Le Seigneur lui répondit : Marthe, Marthe, tu t’inquiètes et tu t’agites pour beaucoup de choses. Une seule chose est nécessaire. Marie a choisi la bonne part, qui ne lui sera point ôtée. (Lc 10:38-42)

Dans l’Église orthodoxe, ce récit a acquis un statut exceptionnel, car il est lu durant la liturgie à chaque fête de la Mère de Dieu. Dans la tradition patristique, les deux sœurs sont le plus souvent considérées comme les archétypes des deux modes de vie chrétienne, l’une active, l’autre contemplative :

« (…) Par Marthe, il faut entendre la vertu active, et par Marie, la contemplation. Les soucis et l’inquiétude sont le propre de la vertu active, tandis que la contemplation, devenue maîtresse des passions (car Marie signifie « maîtresse »), se consacre uniquement à la compréhension des paroles divines et des jugements (…). Quiconque s’assied aux pieds de Jésus, c’est-à-dire quiconque s’établit dans la vertu active et s’affermit en elle en imitant le parcours et la vie de Jésus, parvient par la suite à entendre les paroles divines ou à contempler (…). C’est pourquoi, toi aussi, si tu le peux, accède au rang de Marie qui devient maîtresse des passions, accédant la première à la contemplation. Si tu n’en as pas la force, sois Marthe, qui s’attache à la part active et de cette manière accueille en elle le Christ. »

Théophylacte de Bulgarie (d’Ohrid), Commentaire sur l’Évangile de Luc.

Cependant, dans les paroles mêmes que Jésus adresse à Marthe, rien n’est dit sur la contemplation. Il est plutôt question du fait d’écouter attentivement Ses paroles qui sont source de la vie et du salut. Jésus en parle également ailleurs :

Celui qui écoute Ma parole, et qui croit à Celui qui M’a envoyé, a la vie éternelle et ne vient point en jugement, mais il est passé de la mort à la vie (Jn 5:24).

En reprochant à Marthe de trop s’inquiéter, Jésus ne la condamne pas, mais Il lui rappelle ce qui doit occuper la première place : Sa propre présence dans la vie de l’homme, le désir de l’homme de L’entendre.

Jésus Lui-même n’a pas choisi la voie de la contemplation, et Ses préceptes moraux sont consacrés principalement à l’amour du prochain en actes. En parlant du Jugement dernier, Il donne divers exemples de vertu :

Car j’ai eu faim, et vous M’avez donné à manger, j’ai eu soif, et vous M’avez donné à boire ; j’étais étranger, et vous M’avez recueilli ; j’étais nu, et vous M’avez vêtu ; j’étais malade, et vous M’avez assisté ; j’étais en prison, et vous êtes venus vers Moi (Mt. 25:35-36).

Et Il ne dit pas un mot de la contemplation.

Marthe et Marie se distinguent nettement de l’ensemble des autres femmes qui ont suivi Jésus. L’évangéliste Jean fait la remarque suivante :

Or, Jésus aimait Marthe, et sa sœur, et Lazare (Jn. 11:5).

Quelques jours avant sa mort, Jésus fut invité à Béthanie où on lui fit un souper ; Marthe servait, et Lazare était un de ceux qui se trouvaient à table avec Lui. Marie, ayant pris un livre de parfum de nard pur de grand prix, oignit les pieds de Jésus, et elle Lui essuya les pieds avec ses cheveux (Jn. 12:2-3).

Les autres femmes…

Les renseignements que nous recueillons sur les autres femmes sont bien moins nombreux. Tout au long du récit évangélique (cela concerne les quatre Évangiles), les femmes semblent rester en arrière-plan ; elles apparaissent sur le devant de la scène seulement dans les derniers chapitres des Évangiles, dans les récits de la mort de Jésus sur la Croix et des événements qui ont suivi. Luc signale que parmi ces femmes se trouvaient celles que Jésus avait guéries d’esprits malins et de maladies.

Les trois évangélistes synoptiques emploient le quantitatif « beaucoup » pour parler des femmes présentes dans l’entourage de Jésus (Mt 27:55 ; Mc 15:41 ; Lc 8:3). Cependant, seul un petit nombre d’entre elles faisaient partie du cercle restreint, ce que Luc précise en employant le déterminant indéfini « certaines ». C’est précisément ce cercle de femmes, disciples de Jésus, qui occupe une place essentielle dans les récits des événements liés à Sa mort et à Sa résurrection.

La liste complète des femmes expressément nommées comporte les noms suivants :

  • Marie Madeleine (Mt 27:56, 61 ; 28:1 ; Mc 15:40, 47 ; 16:1, 9 ; Lc 8:2 ; 24:10 ; Jn 19:25 ; 20:1, 11-18) ;
  • les sœurs Marthe et Marie de Béthanie (Lc 10:38-42 ; Jn 11:1-44 ; 12:1-8) ;
  • Marie, mère de Jacques et de Joseph (ou Joses, ou José) (Mt 27:56 ; Mc 15:40, 47 ; 16:1 ; Lc 24:10),
  • l’autre Marie (Mt 27:61 ; 28:1) ;
  • Marie, de Cléophas (Jn 19:25) ;
  • Jeanne (Lc 8:3 ; 24:10) ;
  • Salomé (Mc 15:40 ; 16:1),
  • Suzanne (Lc 8:3).

Cela fait neuf noms au total (ou huit si l’on considère que Marie, mère de Jacques et Joseph, et « l’autre Marie » sont une seule et même personne), dont cinq (ou quatre) portent le nom de Marie.

Comme on le voit dans la liste, Marie de Magdala est mentionnée plus souvent que les autres femmes qui ont suivi Jésus, et c’est la seule femme à être citée dans chacun des quatre Évangiles.

Cet article fait partie de la série basée sur les six volumes de Jésus-Christ. Vie et Enseignement par le métropolite Hilarion (Alfeyev). Retrouvez-nous chaque vendredi pour une nouvelle réflexion, ou procurez-vous le premier volume sur le site des Éditions des Syrtes.

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