Nous vous invitons à lire le sermon du patriarche Porphyre prononcé le 19 mai 2022 à la fin de la liturgie de la réconciliation à Belgrade rétablissant la communion liturgique et canonique entre l’Église orthodoxe serbe et l’Église orthodoxe macédonienne – Archevêché d’Ohrid.
« Le Christ est ressuscité ! En vérité le Seigneur est ressuscité, frères et sœurs, et par sa résurrection Il nous a donné la plénitude de joie, de beauté et de toute bonne chose. En outre, Il nous donne la vie, la vie en abondance, la vie éternelle, celle qui ne se termine pas dans le non-sens. Dans cette joie pascale, votre Béatitude, vos Excellences frères archipasteurs, frères prêtres, chers frères et sœurs, nous pouvons nous exclamer joyeusement par les paroles du psalmiste : Voici le jour que fit le Seigneur, égayons-nous et réjouissons-nous en lui !
Réjouissons-nous, frères et sœurs, car aujourd’hui la plénitude de l’Église du Christ se réjouit ! Ciel et terre se réjouissent ! Tous les saints se réjouissent ! Saint Sava réjouit ainsi que tous ceux qui sont enracinés en lui, germés de sa racine et développés à travers les siècles et dont nous goûtons aujourd’hui les fruits. Réjouissons-nous, car aujourd’hui, grâce à leurs prières justement, nous nous sommes réunis dans ce temple votif du peuple serbe, qui est dédié à Saint Sava, pour manifester le commandement de Dieu, pour comprendre, en nous souvenant des paroles : Voici le jour que fit le Seigneur (Ps 118), que Dieu a créé non seulement ce jour, mais le monde entier. Il a créé ce qui est visible, mais également ce qui est invisible. Il a tout créé pour être un immense temple d’alliance de l’icône de Dieu, c’est-à-dire de l’homme, de nous les humains. En d’autres termes, le monde a été créé pour être un temple de Dieu, pour glorifier Dieu, et nous, les humains, avons été créés comme membres du sacerdoce royal, afin que chacun de nous puisse être prêtre là où il est et dans ce qu’il fait, pour que chacun crée sur la base de ses dons et qu’en créant il glorifie le nom de Dieu. Le Seigneur, qui a tout créé, nous a encore rappelé et nous a ordonné que nous tous soyons un. Tout est créé pour être un, et pour cela les gens doivent être un les uns avec les autres. Ils doivent former une communauté d’amour basée sur la Parole de Dieu, qui est basée sur Dieu lui-même, sur le Christ vivant. Alors tout le monde sera un ! C’est ce que Dieu veut de nous ! Si nous, les humains, sommes un, alors tout est un, alors il y a Une Église, et elle est Une parce que le Seigneur est Un en tant que Chef de l’Église. Avec une seule foi, nous construisons l’unité, et en gardant un ordre unique, nous gardons la foi et à travers cet ordre, nous manifestons notre foi en un Dieu trine.
Donc, il n’y a pas d’unité sans foi en un Dieu trine, mais également sans participation à ce même ordre que nous appelons l’Église, les canons. C’est vrai pour chaque paroisse, pour chaque Église locale, pour toute l’orthodoxie, parce que nous confessons la foi en l’Église une, sainte, catholique et apostolique. Tout d’abord, l’Église est Une, parce que Dieu est Un. Et si elle n’est pas Une, elle ne peut pas être ni sainte, ni catholique. L’unité dans la foi, dans la tradition et dans l’ordre de l’Église jaillit de la Sainte Liturgie. Cela est manifesté et confirmé en Elle. Nous sommes un en Christ lorsque nous communions d’un même Calice. Alors frères et sœurs, l’unité de la communauté est sainte. C’est pourquoi nous ne devrions pas être surpris par le fait que les puissances de ce monde accepterons tout sauf l’unité – et en disant les puissances de ce monde je parle à la manière de l’apôtre Paul et du langage du Nouveau Testament, c’est-à-dire les puissances qui s’opposent à Dieu, qui n’aiment pas le Christ, parce que Christ au moins perturbe leur ordre, et on dit de façon moderne : il perturbe la marche de leurs affaires, parce que le Christ est un miroir, en Lui nous voyons ce que nous sommes – donc, les puissances de ce monde, frères et sœurs que nous appelons dans le langage des Écritures : puissances démoniaques. Ils ont besoin de polarisation, de scission, d’abord dans un individu – ils veulent déchirer et casser en nous, en une seule personne, un ensemble unique psychosomatique et spirituel, disant par le langage scientifique – et ensuite ils veulent briser l’unité de la famille. Ils font des tas de choses à travers leurs règles et leurs lois, qui ne sont généralement pas conformes à la loi du Christ. Et ici, indépendamment du fait que les puissances de ce monde ont leurs objectifs, notre objectif est d’accomplir la Parole de Christ – d’être un ! Et il se peut que nous tombions, comme cela arrive dans la vie d’un individu, d’une famille ou d’un peuple – et là aussi les puissances de ce monde veulent diviser le peuple et séparer les nations les unes des autres – et il se peut que nous échouions parfois, quand nous n’entendons ni n’accomplissons la Parole du Christ, mais devant Dieu nous savons, déjà depuis les paroles de saint Jean-Baptiste, puis des paroles du Seigneur lui-même, qu’il est humain de tomber, qu’il est humain de pécher, qu’il est humain d’échouer. Cependant, si nous restons en déclin et en échec, nous nous transformons en quelque chose qui n’est pas humain. C’est humain de tomber, mais c’est une grande gloire si on se relève.
Voici aujourd’hui, frères et sœurs, le jour que fit le Seigneur ! Voici un miracle sous nos yeux ! Nous avons eu un schisme avec nos frères de Macédoine qui a duré 55 ans. Cette blessure était profonde et elle faisait mal. Nous nous cochions et nous nous levions avec cette blessure, en attendant et en essayant de la guérir. Tout comme il n’y a rien que nous, les humains, pouvons guérir par nous-mêmes, de même, en particulier dans le Corps du Christ, la blessure ne peut pas être guérie uniquement par nos forces. C’est pourquoi je dis que la blessure a été guérie et que c’est un miracle de Dieu. C’est un don de Dieu, frères et sœurs ! Nous avons tout reçu de Dieu, et lorsque nous souffrons, en plus d’être une expression de la providence de Dieu, c’est le plus souvent le résultat de nos choix et de nos faux pas. La blessure devient alors une opportunité pédagogique. Nous en avons profité. Nous avons compris que la blessure avait été infligée par nos actions, alors nous nous sommes tournés vers le Seigneur, Saint Sava et tous les saints de notre Église de faire ce que nous ne pouvions pas. Et au moment où nous y avons pensé, un tel miracle s’est produit de manière inattendue !
Votre Béatitude, frères archevêques, frères et sœurs, notre joie aujourd’hui est incommensurable, abondante, parce que c’est la joie de l’amour de Dieu, parce que c’est la joie de la grâce de Dieu ! Nous sommes un en Christ, un dans l’Église ! Le grand nombre de frères et sœurs qui sont venus de Belgrade, de Serbie, mais aussi de Macédoine, nous montre que les cœurs de notre peuple fidèle, bon et honorable, de nos peuples, battaient et surtout battent maintenant fort pour nous tous et ensemble avec nous. Ils battent au rythme du Christ et cela nous montre que le Seigneur nous a regardés, que le Seigneur a eu pitié de nous, et nous, en tant que personnes indignes, avons compris que la seule chose que nous ne devions pas faire, c’est de ne pas empêcher la grâce de Dieu d’agir, que notre égoïsme et notre amour-propre ne se dressent pas sur son chemin.
Aujourd’hui nous sommes ensemble dans cette sainte église de Saint Sava. Bien que nous sachions que l’Église est organisée de manière pyramidale, nous avons convenu lors des discussions que nos actions devraient être une pyramide inversée, que le peuple devrait être en haut, et nous en bas, que nous devrions servir le peuple en tout, que nous devrions nous réduire et diminuer, et que l’Église et le Christ grandissent en nous et parmi nous, pour que nous soyons les serviteurs des serviteurs de Dieu.
Que le Seigneur accorde son amour, que sa paix qui est plus nécessaire que toute autre chose à chacun de nous individuellement, mais également au monde entier, que la paix du Christ soit toujours avec nous, que son amour, sa grâce et l’unité que nous ayons en Lui par la Sainte Eucharistie, par l’Église, soient des témoins urbi et orbi, un témoin au monde et à tous les hommes que le Christ est l’Alpha et l’Oméga ; que nous pouvons tout avoir, mais que sans Lui nous ne sommes rien ; et si nous n’avions rien que Lui, alors nous avons en fait tout obtenu et sommes devenus les dirigeants du monde. Bienvenue ! Bénissez-nous ! Communiquez nos bénédictions et nos salutations à votre Église et à votre peuple, notre Église et notre peuple. Que Dieu soit avec nous, maintenant et pour des siècles des siècles. De nombreuses années !
Cathédrale de Saint Sava à Vračar, le 19 mai 2022