Le tesson d’Agrigente : un parcours exceptionnel au cœur de Byzance
Voici un ouvrage qui retrace l’itinéraire fascinant de Nicole Thierry, figure majeure de la byzantinologie française. « Le tesson d’Agrigente – itinéraire de Nicole Thierry byzantiniste » nous plonge dans l’aventure scientifique et humaine d’une femme d’exception qui a consacré près de soixante années de sa vie à l’exploration des trésors de la Cappadoce byzantine.
Une œuvre de redécouverte
En 1954, lorsque Nicole Thierry entreprend ses premières missions en Cappadoce, les églises et monastères byzantins de cette région du centre de la Turquie gisent dans l’abandon. Transformés en refuges pour chauves-souris, pigeonniers ou granges, ces témoins de la foi orthodoxe primitive semblent voués à l’oubli. Si l’archéologue Guillaume de Jerphanion avait ouvert la voie au début du XXe siècle, d’immenses pans de ce patrimoine restaient encore à découvrir.
C’est dans ce contexte que Nicole Thierry, alliant sa formation de médecin à sa passion pour Byzance, va arpenter inlassablement le haut plateau cappadocien. Son travail méticuleux lui permettra de rapporter des masses considérables d’images des fresques de la Chrétienté orthodoxe naissante, développant une approche spécifique et originale qui nourrira de riches débats scientifiques.
Un parcours de vie exceptionnel
Au-delà de l’aventure scientifique, ce livre retrace le parcours humain remarquable de Nicole Thierry. Née à Colmar en 1925, ayant vécu les années sombres de l’Occupation à Paris, devenue anesthésiste à Étampes dans l’après-guerre, elle incarne une génération de femmes qui ont su s’imposer dans des domaines traditionnellement masculins.
L’ouvrage révèle également la richesse de ses rencontres intellectuelles, des figures aussi diverses qu’Henri Laborit et André Leroy-Gourhan aux grands byzantinistes de son époque : André Grabar, Paul Lemerle, Vitalien Laurent. Ces échanges ont nourri sa réflexion et contribué à forger son approche singulière de l’art byzantin.
Un témoignage sur une époque révolue
Ce livre constitue également un précieux témoignage sur les voyages au Proche-Orient d’avant l’ère du tourisme de masse, quand l’exploration archéologique relevait encore de l’aventure authentique. Les « péripéties » évoquées laissent deviner les difficultés et les joies de ces missions qui ont permis de sauvegarder pour la postérité des trésors de l’art orthodoxe.
« Le tesson d’Agrigente » s’annonce comme un ouvrage indispensable pour tous ceux qui s’intéressent à l’histoire de Byzance, à l’archéologie chrétienne d’Orient, mais aussi aux destins exceptionnels de ces chercheurs qui ont consacré leur vie à la préservation de notre patrimoine spirituel et artistique.