Remercions les éditions du monastère d’Ormylia, qui nous offrent, traduit en français, un nouvel enseignement de Geronda Aimilianos, portant sur un des grands textes de ce recueil de trésors spirituels qu’est la Philocalie : Le Discours sur la vigilance de saint Hésychius de Batos. Hésychius de Batos et Geronda Aimilianos ont comme point commun d’être de véritables théologiens, de ceux « qui nous parlent d’un pays où ils sont allés ».
De ce fait, le commentaire est dense : le texte de Geronda Aimilianos ne procède point de quelque savoir livresque, mais se nourrit de l’expérience mystique de son auteur, qui eut la grâce de se laisser habiter par l’Esprit-Saint, jusqu’à « entendre la respiration du Christ », et sentir « Son souffle caresser son visage », comme il nous le fait discrètement comprendre. (p 93)
Chacun de ces deux auteurs s’adressa d’abord à des moines ou à des moniales, mais ce serait ne rien comprendre de la vie chrétienne, autrement dit de la vie en Christ, que d’en conclure que de telles pages ne concerneraient aucunement les laïcs. Lorsque l’apôtre Pierre écrivait : « Soyez sobres et vigilants, car votre adversaire, le Diable, rôde, cherchant qui dévorer » (1 P 5,8), il s’adressait à tout chrétien, quelle que fut sa place au sein de l’Église. Il en va de même, avec cet ouvrage : il exhorte, lui aussi, chacun de nous à demeurer vigilant. La vigilance, en effet, n’est rien d’autre que le combat spirituel par lequel nous en appelons à l’Esprit-Saint pour qu’Il nous délivre de l’esclavage du Monde – et nous savons qui en est le Prince ! – et nous détermine à nous agripper à la main que le Christ nous tend. Ce combat spirituel a pour adversaire toutes les fantasmagories de notre moi déchu, toutes ces illusions et ces chimères embusquées dans notre intellect ; elles nous perturbent, nous égarent, nous empêchent de demeurer continument tournés vers Dieu.
Ce nouvel opus nous convainc que la vigilance constitue la voie étroite et lumineuse de tout avancement dans la vie spirituelle : loin de nous mutiler, elle nous libère et nous conduit dans la joie de ceux qui se laissent enfanter en Dieu.
Jean Gobert