Le métropolite Luc de Zaporojié et de Melitopol a publié son appel, en date du 15 août 2024, au primat de l’Église orthodoxe ukrainienne. Dans son message, le hiérarque a exprimé son opinion sur la question de l’appel du chef de l’Église orthodoxe d’Ukraine à l’Église orthodoxe ukrainienne, selon lequel le dialogue pour l’union des deux entitésdevrait être entamé immédiatement, sans aucune condition préalable.
Le texte intégral de l’appel du métropolite Luc est publié ci-dessous.
« Appel à Sa Béatitude Onuphre, métropolite de Kiev et de toute l’Ukraine
Votre Béatitude,
Après avoir lu l’appel du dirigeant de « l’Église orthodoxe d’Ukraine » qui s’adressait non seulement à vous, mais à tout le clergé et les laïcs de notre Église, je me permets d’exprimer mon opinion sur la nature des propositions qui y sont exposées.
Moi-même et le troupeau que Dieu m’a confié prions toujours et prierons encore pour que soient guéris les divisions et les troubles entre les personnes professant la foi orthodoxe dans notre pays, et pour que vienne enfin la paix et l’unité spirituelle tant attendue. Le désir de mon cœur est que tout notre peuple chante la Sainte Trinité d’une seule bouche et d’un seul cœur. Mais vous comprenez bien sûr qu’il est impossible que cette unité soit créée artificiellement, autour de préférences nationales, politiques ou toutes autres préférences terrestres. Cette unité n’est possible qu’autour du Christ et en Christ. Et cela est possible exclusivement sur le fondement canonique de l’Église Une, Sainte, Catholique et Apostolique.
La grâce du sacerdoce et la reconnaissance de la succession apostolique du clergé ne peuvent être une décision d’ordre administratif. Celle-ci ne peut être vraie et valide que si le sacrement lui-même est accompli par des personnes qui en ont le droit canonique. Sans observer une telle condition, nous apporterons le chaos dans nos sacrements, ce qui conduira non pas à l’unité, mais à la destruction des fondements de la vie ecclésiale.
Les architectes et les fondateurs des schismes actuels agissent non pas pour le bien de l’unité de l’Église, mais à son encontre, ignorant non seulement les opinions du troupeau de plusieurs millions de fidèles, mais aussi celles des canons. En créant de nouvelles formations ecclésiastiques, ils espèrent que le peuple orthodoxe pourra être manipulé par la propagande ou la peur de la violence. En prenant l’exemple de notre troupeau, on peut dire qu’ils échoueront. Le soi-disant « Concile d’unification », initié par des dirigeants politiques individuels, visait non pas à réaliser l’unité de l’Orthodoxie sur le territoire de notre Patrie, mais à la détruire en enfreignant ouvertement le droit canonique et la tradition ecclésiale.
Nous ne refusons pas le dialogue avec toutes les personnes de bonne volonté qui veulent sincèrement l’unité de l’Orthodoxie en Ukraine. Mais pour moi personnellement, cela reste un mystère : comment est-il possible, en utilisant la violence, les menaces, les coups, les falsifications, le sacrilège et le vol, de parler de la nécessité d’amour et de paix ? Comment peut-on parler de lumière lorsque l’on accomplit les œuvres des ténèbres ? Dieu voit le cœur des gens. La première chose par laquelle, à mon avis, le dialogue sur notre unité devrait commencer est la reconnaissance des atrocités qui ont été commises contre notre Église et le repentir pour celles-ci.
L’adresse en discussion contient consciemment, ou par malentendu, un certain nombre d’inexactitudes et d’erreurs. Nulle part et jamais dans les conversations officielles ou privées, Sa Béatitude Vladimir (Sabodan) n’a exprimé l’opinion selon laquelle nous devrions d’urgence réaliser l’unité, tout en ignorant les canons de l’Église orthodoxe. Il a toujours soutenu le contraire. Sa position claire était connue de nous tous : l’unité sur des bases canoniques solides ! Il est également vrai que l’intervention du patriarche œcuménique était alors « canoniquement fondée ». Bien mieux, je sais que le patriarche œcuménique lui-même avait ouvertement, lors de réunions personnelles (j’ai participé à l’une d’entre elles, àTbilissi) avec des représentants de notre épiscopat, rejeté de toutes les manières possibles les rumeurs selon lesquelles il se préparait à reconnaître en tant qu’ »Église » ceux que lui-même appelait peu avant« schismatiques ». Il avait également nié par tous les moyens possibles que les préparatifs étaient en cours pour la proclamation du « tomos ». Mais disant une chose, le patriarche œcuménique en faisait en réalité une autre, ce qui, à mon avis, est également incompatible avec l’éthique et la morale évangéliques.
Votre Béatitude, vous savez que toutes les affirmations que nous entendons maintenant de la bouche de certains hommes politiques et députés sont fantaisistes et totalement dénuées de bon sens. Notre conscience est claire devant Dieu et notre peuple. Nous n’avons à avoir honte de rien et ne devons être gênés en rien. Toute persécution, oppression et menace de la part des ennemis de notre Église ne pourront ébranler notre foi et notre certitude dans notre droiture. Mais tout compromis avec des gens qui servent des intérêts de ce monde ne fera que nous rendre plus vulnérables. Nous ne serons pas compris ni soutenus par les représentants des autres Églises locales qui, sans crainte aucune, ont pris notre défense au niveau international. Parce que dans ce cas, nous perdrons l’aide de Dieu.
Je ne doute pas que cet appel du chef de « l’Église orthodoxe d’Ukraine » soit dicté non par le désir d’être uni à nous dans l’esprit et la vérité, mais par d’autres intentions qui sont loin de ces désirs. En mon nom personnel et au nom du troupeau que Dieu m’a confié, répondant à cet appel, je tiens à souligner encore une fois que la réalisation de l’unité de l’Église de Dieu ne peut être réalisée qu’à la seule condition du retour en son sein des personnes qui ont dévié de la Vérité et pris le chemin du mensonge.
Votre humble serviteur,
Luc, métropolite de Zaporojié et Melitopol