Carême de la Nativité
Saint Daniel, stylite près de Constantinople (490) ; saints Victoric, Gentien et Fuscien, martyrs à Amiens (303); saint Aïthalas et saint Apsées, martyrs en Perse (354) ; saint Avre, hiéromoine en Maurienne (VIIème s.) ; saint Mérax, ermite en Égypte (VIIème s.) ; saint Luc le Nouveau Stylite (979) ; saint Nicon « le sec » de la Laure des Grottes de Kiev (XIIème s.) ; saints nouveaux martyrs de Russie : Théophane, évêque de Solikamsk et avec lui deux hiéromartyrs et cinq martyrs (1918) ; Nicolas (Vinogradov), prêtre (1937), Jean (Bogoyavlensky), prêtre (1941).
SAINT DANIEL LE STYLITE
Astre illuminant le monde de l’éclat de ses vertus et vivante échelle qui, à son exemple, nous invite à monter de la terre vers le ciel, notre saint Père Daniel était originaire du petit village de Mératha (« les Cavernes »), près de Samosate en Syrie (409). Sa mère, restée longtemps stérile, l’obtint par ses prières, à la suite d’une vision lumineuse, signe de la gloire réservée à son enfant. Parvenu à l’âge de cinq ans, il fut conduit par ses parents dans le monastère voisin pour être consacré à Dieu comme le prophète Samuel (1 Sam 1, 19sv). Il reçut alors le nom de Daniel, après avoir, sur l’ordre du supérieur, tiré au hasard le livre du prophète Daniel qui se trouvait placé devant l’autel ; mais il ne fut pas accepté dans le monastère, à cause de son trop jeune âge. Quand il eut atteint ses douze ans, il entendit sa mère lui dire : « Mon enfant, je t’ai consacré à Dieu. » Sans plus attendre, il se rendit de lui-même dans un monastère des environs et obtint par ses instantes supplications d’être reçu parmi les frères, malgré les réticences de l’higoumène. Il fit de tels progrès dans la voie de Dieu et montra une telle ardeur pour les combats de la vertu qu’au bout de peu de temps, le supérieur le tonsura et le revêtit de l’Habit angélique, en présence de ses parents au comble de la joie, puis il en fit son disciple préféré.
Partant un jour pour prendre part à une réunion d’archimandrites convoquée par l’archevêque d’Antioche, son supérieur prit Daniel pour compagnon de voyage et lui donna ainsi l’occasion de réaliser son plus cher désir : vénérer les Lieux saints et rendre visite à l’illustre saint Syméon le Stylite [ler sept.], dont l’ascèse si peu commune attirait l’admiration des uns et les critiques des autres. Parvenus aux pieds de la colonne du saint, le spectacle d’un combat si héroïque mené pour le Christ et le rayonnement de la charité du grand Ancien frappa de stupeur tous ceux qui avaient mis en doute sa sainteté. Daniel fut le seul à surmonter la crainte qui paralysait les higoumènes qu’il accompagnait et, au moyen d’une échelle, il monta prendre la bénédiction du saint qui lui dit : « Courage, Daniel, prends force et patience, car tu auras à supporter pour Dieu bien des fatigues. Mais j’ai confiance dans le Seigneur que je sers, qu’il te fortifiera et se fera ton compagnon de route. »
Quelque temps après, son higoumène ayant été rappelé vers le Seigneur, Daniel, alors âgé de trente-sept ans, fut désigné pour le remplacer (446). Après avoir éprouvé les capacités de son second, il se rendit à nouveau, pour deux semaines, auprès de saint Syméon ; puis il se mit en route pour enfin visiter les Lieux saints et s’enfoncer dans la solitude du désert de Palestine. Sur la route, un vieillard ayant l’apparence de saint Syméon, lui apparut soudain et le persuada de ne pas s’exposer inutilement au danger des rebelles Samaritains, mais de prendre le chemin de Constantinople, la « nouvelle Jérusalem », illustrée par la présence de tant de précieuses reliques et de si nombreux sanctuaires, et aux environs de laquelle on pouvait aisément trouver la quiétude du désert.
Parvenu aux abords de la ville impériale, dans un endroit appelé Anaplous , Daniel se retira d’abord, pendant sept jours, dans une chapelle dédiée à l’Archange Michel pour y prier ; puis, à l’exemple des vaillants héros de la foi : Antoine, Paul et tant d’autres, il pénétra avec audace dans un temple païen infesté de démons qui maltraitaient beaucoup de voyageurs, revêtu de l’armure de Dieu, du bouclier de la foi et du glaive de la prière (Éph 6, 14). Indiffèrent aux cris sauvages qui perçaient le silence de la nuit et aux jets de grosses pierres, l’athlète du Christ persévéra dans la prière, nuits et jours, et mit en fuite les esprits impurs par le feu de la vivifiante Croix. Enfermé dans ce temple, il ne communiquait avec les visiteurs, qui affluèrent bientôt attirés par sa réputation, que par une étroite ouverture. Pris de fureur devant une telle renommée, le démon excita la jalousie de quelques clercs de Saint-Michel, qui allèrent dénoncer le serviteur de Dieu à l’archevêque saint Anatole [3 juil.], en l’accusant d’être monophysite. Après avoir repoussé une première fois les calomniateurs, le sage prélat fit amener Daniel à Byzance. Grandement édifié par sa pure confession de foi et plein de reconnaissance après avoir été délivré d’une grave maladie par la prière du saint ascète, l’archevêque devint l’un de ses plus fervents admirateurs et se résolut difficilement à le laisser regagner sa retraite, accompagné par une foule en liesse.
Neuf années plus tard, âgé de cinquante et un ans (460), Daniel tomba un jour en extase et vit saint Syméon le Stylite debout devant lui, au sommet d’une immense colonne de nuée, entouré de deux hommes à l’apparence lumineuse qui, sur l’ordre du vieillard, vinrent le prendre pour l’amener auprès de lui. Celui-ci l’embrassa paternellement et disparut dans le ciel, en laissant son fils spirituel sur la colonne, en compagnie des deux anges. Cette vision fut bientôt confirmée par l’arrivée d’un des disciples du grand Stylite, le moine Serge, qui venait annoncer le trépas de saint Syméon à l’empereur Léon Ier (457-474), et lui remettre la cuculle de peau du saint . Mais l’entrevue avec le souverain tardant, il remit finalement la précieuse relique à Daniel, devenu ainsi, tel un nouvel Élisée, héritier de la mélote d’Élie après son départ vers le ciel (2 Rois 2, 13).
Confirmé par ces signes et averti du moment propice par un songe, Daniel, aidé de quelques pieux amis, décida de sortir du temple pour suivre la voie de saint Syméon et monter sur une colonne, haute de la taille de deux hommes, qu’une colombe blanche, envoyée par Dieu, avait désignée au saint et à ses compagnons. Le propriétaire des lieux, Gélanios, préposé à la table impériale, fut irrité de cette intrusion et voulut chasser Daniel ; mais à la suite d’un orage soudain qui détruisit ses vignes et devant le spectacle de l’endurance du stylite, il changea d’avis. Dans son enthousiasme pour l’héroïque combattant du Christ, il fit même construire à côté une nouvelle colonne, plus haute, aux pieds de laquelle Serge s’installa afin d’assurer la direction des disciples qui venaient vivre là en nombre sans cesse croissant. Exposé devant les hommes et les anges comme le Christ sur la Croix, Daniel restait immobile, ne vivant que pour le Ciel, et en retour Dieu utilisait sa colonne comme un canal déversant à profusion sa grâce sur les fidèles. Miracles, signes, guérisons, paroles de salut et de sagesse céleste attirèrent bientôt auprès du solitaire un grand nombre de visiteurs, parmi lesquels se trouvaient les personnages les plus illustres du temps : le consul Cyrus, dont les deux filles furent guéries par le saint, l’impératrice Eudocie, fille de Théodose II, à son retour d’Afrique, et l’empereur Léon lui-même, qui obtint un héritier grâce à la prière de Daniel et qui, en témoignage de gratitude, fit jeter les bases d’une troisième colonne.
Dévorés par le démon de la jalousie, des hérétiques envoyèrent alors au bienheureux une célèbre prostituée pour le dévoyer, mais celle-ci fut soudain assaillie et cruellement tourmentée par un démon. Elle en fut finalement délivrée par la prière de Daniel, à la confusion des intrigants qu’elle dénonça en public. Devant une telle renommée, le pieux empereur pressa l’archevêque Gennade [458-471, 17 nov.] d’ordonner prêtre l’homme de Dieu, malgré ses réticences. Mais une fois le hiérarque et sa suite sur les lieux, Daniel, devinant leur projet, ne les laissa pas monter jusqu’à lui. Saint Gennade prononça alors la prière d’ordination à distance, demandant au Christ d’imposer d’en haut invisiblement la main sur son disciple, pendant que la foule criait : « Il est digne ! » Daniel finit par céder et demanda que l’on pose l’échelle pour que l’évêque monte vers lui. Après s’être embrassés, ils reçurent la sainte Communion l’un de l’autre, entre le ciel et la terre. Peu après l’installation de Daniel sur la troisième colonne, la capitale fut ravagée pendant une semaine par un terrible incendie (ler septembre 465), qui avait été prédit par le saint, mais l’empereur et sa cour n’en avaient pas tenu compte. Le souverain lui-même et son épouse vinrent alors demander pardon et le supplier d’intercéder pour le peuple de Dieu en détresse. Peu après, un violent orage se déchaîna et le vent ébranla la colonne qui avait été mal ajustée, de sorte qu’elle oscillait de droite à gauche sous des trombes d’eau, en mettant à tout moment en danger la vie du solitaire, sous le regard effrayé de ses disciples. Une autre fois, en hiver, le vent emporta sa tunique de peau, et Daniel resta toute la nuit exposé nu à la neige. Lorsque, bien tard, ses disciples vinrent à lui, ils le trouvèrent inanimé et couvert de glace. Après l’avoir ranimé avec de l’eau chaude, ils apprirent avec stupeur que pendant tout ce temps, le saint avait été transporté en esprit dans un lieu de repos, où il s’était entretenu avec saint Syméon le Stylite. À la suite de cet incident, l’empereur exigea que l’on construisît un petit abri au-dessus de la colonne pour protéger Daniel des intempéries. L’empereur Léon était si admiratif devant la conduite du saint stylite qu’il se fit bâtir une demeure à proximité et lui amenait tous ses visiteurs étrangers, rois ou ambassadeurs. C’est ainsi que Daniel joua le rôle de médiateur entre Léon et le roi des Lazes, Goubazios, pour régler leurs différends politiques.
À maintes autres occasions, l’homme de Dieu mit son esprit prophétique, sa sagesse et le pouvoir de sa prière au service du bon droit et de la justice. Lorsque Basilisque usurpa le pouvoir et chassa l’empereur Zénon (475), prenant la défense des monophysites, il voulut rejeter les décisions du saint Concile de Chalcédoine, et menaça l’archevêque Acace qui dut trouver refuge à Sainte-Sophie, entouré par les moines de la capitale. Après avoir repoussé les avances de Basilisque, qui cherchait à l’attirer à son parti, saint Daniel, confirmé par un signe divin, résolut de descendre de sa colonne et de se rendre en ville — comme saint Antoine autrefois — pour venir au secours à l’Église en détresse. Porté par une foule immense et enthousiaste, qui grandissait d’autant plus que les guérisons se multipliaient sur son passage, le saint se rendit d’abord à la Grande Église pour y prêcher la foi orthodoxe, puis il poursuivit sa marche triomphale jusqu’au palais de l’Hebdomon, où s’était réfugié l’usurpateur. En signe de malédiction, il secoua alors devant la porte la poussière de ses pieds, selon la parole évangélique (Mt 10, 14), imité par la foule. Basilisque, effrayé devant ce déploiement de force, fut convaincu lorsque la tour du palais s’écroula à l’arrivée du saint, aussi décida-t-il de rentrer dans la capitale, où il fit profession d’orthodoxie et se réconcilia avec Acace en présence de tout le peuple. De retour sur sa colonne, après d’autres miracles opérés sur le chemin, Daniel prédit la mort prochaine de Basilisque et le retour au pouvoir de Zénon (476-491), lequel lui montra une grande vénération, ainsi que son successeur Anastase (491-518).
La colonne du saint était devenue un des lieux les plus vénérés de la région de Constantinople. On y accourait de toutes parts et, malgré les objections de Daniel, l’empereur y fit construire une vaste hôtellerie, à côté d’une église où étaient déposées les reliques de saint Syméon le Stylite, venues d’Antioche. Tel un ange terrestre, le cœur et les yeux constamment tournés vers Dieu, le saint homme demeurait inaccessible à la vaine gloire ou à l’orgueil. Au contraire, ses innombrables miracles étaient pour lui l’occasion de progresser dans l’humilité, car il ne les attribuait jamais à sa propre vertu, mais demandait à ceux qui venaient à lui d’aller vénérer les reliques de saint Syméon ou de s’oindre avec l’huile des veilleuses qui brûlaient près du tombeau du saint.
Cette humilité admirable, il la manifesta, jusque dans la mort. En effet, après avoir prédit son prochain départ vers le ciel, Daniel tomba malade. Comme son admirateur, l’empereur Anastase, préparait de somptueuses funérailles, il lui fit promettre d’enterrer son corps profondément et de déposer au-dessus les reliques des saints Ananias, Azarias et Misaël [17 déc.], récemment transférées de Babylone à Constantinople, de sorte que si quelqu’un voulait vénérer sa tombe, il attribuât aux saints martyrs la satisfaction de ses demandes.
Âgé de quatre-vingt-quatre ans, saint Daniel assembla ses nombreux disciples, quelques jours avant sa dormition, pour leur livrer son dernier enseignement et demander l’assistance de leurs prières. Alors que la foule venue de la capitale grandissait sans cesse pour assister à ses derniers instants, il tomba en extase de nuit et contempla l’assemblée de tous les saints qui, après l’avoir salué comme l’un des leurs, l’engagèrent à célébrer avec eux la Divine Liturgie. Après être revenu à lui, il communia aux saints Mystères et s’endormit en paix, le lendemain, 11 décembre 493, en délivrant un possédé d’un esprit impur, au moment même où il rendait son dernier soupir. Avec bien des difficultés, on réussit à descendre la dépouille du saint homme du haut de sa colonne où il se tenait recroquevillé depuis trente-trois ans et, après avoir été présenté à la vénération du peuple, il fut enseveli en présence de tous les plus grands personnages de la capitale.
(Tiré du Synaxaire du hiéromoine Macaire de Simonos Petras)
TROPAIRES ET KONDAKIA DU JOUR
Tropaire de saint Daniel, ton 1
Colonne de patience, tu fus digne des patriarches de jadis: * comme Job dans les souffrances et comme Joseph en ses épreuves, * et tu vécus comme un Ange, malgré la chair, * vénérable Père saint Daniel, * prie le Christ notre Dieu de sauver nos âmes.
Kondakion de saint Daniel , ton 8
Tu t’es levé comme un astre éblouissant, Père bienheureux, * tu éclairas le monde sur la colonne par tes saintes actions * et tu dissipas les ténèbres de l’erreur; * fais briller dans les âmes de tes serviteurs * la lumière sans déclin de la connaissance de Dieu.
ÉPITRE DU JOUR
I Tim. V, 11-21
Mon enfant Timothée, refuse les jeunes veuves pour être inscrites sur le rôle ; car, lorsque la volupté les détache du Christ, elles veulent se marier, et se rendent coupables en ce qu’elles violent leur premier engagement. Avec cela, étant oisives, elles apprennent à aller de maison en maison ; et non seulement elles sont oisives, mais encore causeuses et intrigantes, disant ce qu’il ne faut pas dire. Je veux donc que les jeunes se marient, qu’elles aient des enfants, qu’elles dirigent leur maison, qu’elles ne donnent à l’adversaire aucune occasion de médire ; car déjà quelques-unes se sont détournées pour suivre Satan. Si quelque fidèle, homme ou femme, a des veuves, qu’il les assiste, et que l’Église n’en soit point chargée, afin qu’elle puisse assister celles qui sont véritablement veuves. Que les anciens qui dirigent bien soient jugés dignes d’un double honneur, surtout ceux qui travaillent à la prédication et à l’enseignement. Car l’Écriture dit : Tu n’emmuselleras point le bœuf quand il foule le grain. Et l’ouvrier mérite son salaire. Ne reçois point d’accusation contre un ancien, si ce n’est sur la déposition de deux ou trois témoins. Ceux qui pèchent, reprends-les devant tous, afin que les autres aussi éprouvent de la crainte. Je te conjure devant Dieu, devant Jésus Christ, et devant les anges élus, d’observer ces choses sans prévention, et de ne rien faire par faveur.
ÉVANGILE DU JOUR
Mc VIII, 22-26
Ils se rendirent à Bethsaïda; et on amena vers Jésus un aveugle, qu’on le pria de toucher. Il prit l’aveugle par la main, et le conduisit hors du village ; puis il lui mit de la salive sur les yeux, lui imposa les mains, et lui demanda s’il voyait quelque chose. Il regarda, et dit : J’aperçois les hommes, mais j’en vois comme des arbres, et qui marchent. Jésus lui mit de nouveau les mains sur les yeux ; et, quand l’aveugle regarda fixement, il fut guéri, et vit tout distinctement. Alors Jésus le renvoya dans sa maison, en disant : N’entre pas au village.