Message de Pâques 2025 du patriarche œcuménique Bartholomée

† Bartholomée par la grâce de Dieu archevêque de Constantinople, Nouvelle Rome, et patriarche œcuménique,
tout le plérôme de l’Église que la grâce, miséricorde et paix du Christ glorieusement ressuscité soient avec tout le plérôme de l’Église

* * *

Vénérables frères hiérarques, Enfants bien-aimés dans le Seigneur,

Par la miséricorde et la puissance de Dieu, ayant traversé, dans la prière et le jeûne, la mer de la sainte et grande Quarantaine, et étant parvenus à la radieuse Pâque, nous glorifions le Seigneur, Lui qui est descendu jusqu’aux profondeurs de l’Hadès et qui, par sa Résurrection d’entre les morts, a rendu à tous l’entrée du Paradis.

La Résurrection n’est pas le souvenir d’un événement passé, mais une « transformation salutaire » de notre existence, une « nouvelle naissance, une manière différente de vivre, un autre mode d’existence, un changement fondamental de notre nature même»[1]. En Christ ressuscité, toute la création est renouvelée avec l’humanité. Lorsque nous chantons la 3e ode du Canon de Pâques :

« Maintenant tout est empli de lumière, le ciel, la terre et les abîmes ; que toute créature célèbre la Résurrection du Christ ; en Lui elle puise sa force », nous proclamons que l’univers entier est établi et rempli de lumière sans déclin. Non seulement pour l’histoire du genre humain, mais pour toute la création, il y a un « avant-Christ » et un « après-Christ ».

La Résurrection du Seigneur d’entre les morts constitue le cœur de l’Évangile, le point de référence constant de tous les textes du Nouveau Testament, ainsi que de la vie liturgique et de la foi des Orthodoxes. En vérité, en « Christ est ressuscité » se résume toute la théologie de l’Église. Vivre l’abolition du pouvoir de la mort est une source de joie indicible, « affranchie des liens de ce monde ». « Tout est rempli de joie, ayant reçu l’expérience de la Résurrection ». La Résurrection est une explosion de grande joie, qui imprègne toute la vie ecclésiale, l’éthos et l’action pastorale, comme un avant-goût de la plénitude de vie, de connaissance et de joie du Règne éternel du Père, du Fils et du Saint-Esprit. La foi orthodoxe et le pessimisme sont des réalités incompatibles.

Pour l’humain Pâques est une fête de liberté et de victoire contre les forces d’aliénation, une ecclésialisation de notre existence, une invitation à coopérer à la transfiguration du monde. L’histoire de l’Église devient « une grande Pâque», une marche vers «la liberté de la gloire des enfants de Dieu»[2]. L’expérience de la Résurrection révèle le centre et la dimension eschatologique de la liberté en Christ. Les témoignages bibliques concernant la Résurrection du Sauveur mettent en lumière la puissance de la liberté des croyants, en laquelle seulement se manifeste le « grand prodige», inaccessible à toute forme de contrainte: «Car le mystère du salut est réservé à ceux qui le veulent librement, non à ceux qui y sont contraints»[3] . L’acceptation du don divin comme un « passage » du croyant vers le Christ est la réponse existentielle libre à la traversée aimante et salvatrice du Ressuscité vers l’homme: «Sans moi, vous ne pouvez rien faire»[4].

Le mystère de la Résurrection du Seigneur continue aujourd’hui d’ébranler les certitudes positivistes des négateurs de Dieu, comme étant le « refus de la liberté humaine », les partisans de « l’illusion de l’auto-accomplissement sans Dieu », et les admirateurs du «homme-dieu» moderne. L’avenir n’appartient pas à l’enfermement dans la fatuité, le rétrécissement et le confinement dans un monde sans ouverture au transcendant. Il n’y a pas de vraie liberté sans Résurrection, sans perspective d’éternité.

Pour la sainte Grande Église du Christ, cette année la célébration commune de Pâques par l’ensemble de la chrétienté est une source de joie pascale, en même temps que le 1700e anniversaire du Premier concile œcuménique de Nicée, qui condamna l’hérésie d’Arius, « qui diminua une des personnes de la Trinité, le Fils et Verbe de Dieu», et qui établit le mode pour déterminer de la date de la fête de la Résurrection du Sauveur.

Le Concile de Nicée inaugure une nouvelle période dans l’histoire conciliaire de l’Église, le passage du niveau local au niveau universel des conciles. Comme il est bien connu, le Premier concile œcuménique introduisit le terme non biblique « consubstantiel» (ὁμοούσιος) dans le Crédo, avec une signification sotériologique claire, qui demeure l’élément essentiel des dogmes de l’Église. Dans ce sens, les célébrations du grand anniversaire ne sont pas un retour vers le passé, car « l’esprit de Nicée» demeure intact dans la vie de l’Église, dont l’unité dépend de la juste compréhension et du développement de son identité conciliaire. Parler du Premier Concile de Nicée rappelle les archétypes chrétiens communs et l’importance de la lutte contre les déformations de notre foi immaculée, et nous invite à nous tourner vers la profondeur et l’essence de la tradition de l’Église. La célébration commune cette année de la « très sainte fête de Pâques» souligne l’actualité du sujet, dont la résolution exprime non seulement le respect de la chrétienté pour les définitions dogmatiques du Concile de Nicée, mais aussi la conscience que «sur un sujet d’une telle sacralité, il ne doit pas y avoir de divergence».

Avec de tels sentiments, emplis de la lumière et de la joie de la Résurrection, et en clamant l’universellement joyeux «Christ est ressuscité!», honorons le jour appelé et saint de Pâques par la confession sincère de notre foi en Celui qui, par sa mort, a piétiné la mort, donnant la vie aux hommes et à la création tout entière, notre Rédempteur, par la fidélité aux saintes traditions de la Grande Église, et par l’amour sincère envers notre prochain, afin que soit glorifié en nous tous le nom supracéleste du Seigneur.

Phanar, saintes Pâques 2025

† Bartholomée de Constantinople votre fervent intercesseur dans le Christ Ressuscité

Que ce message soit lu dans les églises au cours de la divine liturgie de la fête de Pâques, après la lecture de l’Évangile.


[1] Grégoire de Nysse, Sermons pascaux, PG 46,604.

[2] Rm 8, 21.

[3] Maxime le Confesseur, En la prière de Notre Père, PG 90, 880.

[4] Jn, 15, 5.

À propos de l'auteur

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Jivko Panev

Jivko Panev, cofondateur et journaliste sur Orthodoxie.com. Producteur de l'émission 'Orthodoxie' sur France 2 et journaliste.
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