Comme chaque année depuis 2022, des chrétiens de toutes confessions en provenance de plusieurs pays étaient invités par la Communauté de Taizé à participer du 17 au 24 août 2025 à la « semaine de partage et de témoignage de la foi orthodoxe ».
Environ 150 orthodoxes étaient présents, parmi lesquels ukrainiens, français, hollandais, russes, serbes, roumains, grecs, mais aussi des orthodoxes orientaux, indiens, coptes, syriaques.
Le programme habituel des rencontres de Taizé avec prières communes et introductions bibliques était complété pour cette semaine particulière par des temps spécifiques à destination des orthodoxes mais aussi de ceux de toutes confessions qui souhaitent découvrir ou mieux connaître l’orthodoxie.
Dans le cadre du thème proposé cette année par le prieur de la communauté de Taizé, frère Matthew, « Espérer au-delà de toute espérance », le frère Pedro animait une réflexion sur les Béatitudes, ouvrant à des partages par petits groupes multi confessionnels.
L’higoumène Danilo (Pavlović) du monastère de l’Annonciation à Žitomislić (Bosnie-Herzégovine), détruit dans la guerre de 1992-95 est venu apporter un témoignage d’espérance. Avec deux autres moines, il a rebâti les murs de ce monastère orthodoxe (serbe) mais aussi travaillé avec succès à rebâtir les liens avec les communautés catholiques (croates) et musulmanes (bosniaques). Il était saisissant de l’entendre dire que la guérison des blessures ne peut se faire qu’en reconnaissant les torts de sa propre communauté. Il a aussi évoqué le fait, en apparence paradoxal, que ce sont ceux qui ont le plus souffert de la guerre qui sont le plus enclins à pardonner et à œuvrer à la réconciliation, tandis que les nationalistes de tous bords qui prêchent la division ethnico-religieuse sont généralement des gens qui n’ont pas trop souffert personnellement de la guerre.
L’archiprêtre Petro Lopatynskyi, enseignant à l’Académie théologique orthodoxe de Kiev, a développé la question de ce qu’est l’Église, réalité « corporative » et non pas « collective ». Jésus-Christ est en nous et à travers nous, nous relie les uns aux autres par le souffle du Saint-Esprit. Un chrétien ne peut être chrétien qu’en manifestant la présence du Christ dans sa relation aux autres.
L’archimandrite Joan Lena, enseignant en théologie liturgique orthodoxe aux Pays-Bas, a exposé le déroulé de la Divine liturgie. « Divine » car œuvre de Dieu, et « liturgie » car œuvre du laos, le peuple qui fait Église. Il a insisté sur le but réel de la liturgie : que les participants deviennent temple du Christ.
L’iconographe et théologienne Élisabeth Hériard Dubreuil a expliqué en quoi la réalisation d’une icône obéit aux principes de justice et de miséricorde. Elle a développé les 7 phases de réalisation, précédées pour l’iconographe par un jeûne dont le but est de le couper du monde pour l’orienter vers Dieu.
Norman Russell, théologien orthodoxe, professeur à l’Institut Sainte Euphémie de Chalcédoine à Bologne, a évoqué le principal enjeu du Concile de Nicée: la formulation de la consubstantialité dans le credo. Le Père est la source de la divinité, le Fils est Dieu car il est de même essence ; ainsi l’incarnation du Fils nous permet de nous unir à la source de la divinité. Le conférencier a rappelé l’opposition des conservateurs de l’époque et constaté que c’est parfois l’innovation qui a sauvé la Tradition véritable.
Trois liturgies orthodoxes ont été célébrées, dont l’une dans la grande église de la Réconciliation rassemblant 1500 chrétiens, présidée par l’archimandrite Joan Lena et concélébrée par une dizaine de prêtres et diacres originaires de cinq pays différents.
Cette semaine fut aussi une occasion pour les participants de se retrouver dans l’amour des uns pour les autres par delà les divisions des Églises chrétiennes « afin que tous soient un, /…/ pour que le monde croie / …/ » .
Catherine B. et Pierre R/
Photographie : Jon Klockow